Veille scientifique

Posted on juillet 11th, 2015

Le suicide de l’adolescent, une épidémie au cœur de la pandémie ?

Arnaud Fernandez ; Florence Askenazy

UPR Cobtek Université Cote d’Azur
Service Universitaire de Psychiatrie de l’enfant et de l’adolescent
Hôpitaux pédiatriques de Nice CHU Lenval
57 Avenue de la Californie 06200 Nice

La pandémie de COVID-19 est un événement sanitaire inédit dans le monde moderne en termes d’impacts économique, social et médical. Rapidement est apparu une littérature scientifique sur ce sujet. Elle a apporté des données soulignant que les mesures pour répondre à la crise sanitaire (dont le confinement) ont impacté négativement la santé mentale des populations (1) et en particulier celle des enfants et des adolescents (2, 3). Un consortium européen dans le cadre de la société Européenne de Psychiatrie de l’enfant et de l’adolescent (ESCAP) a montré dans des articles publiés mars/mai 2020, un an après le début de la pandémie, la perception de cet impact négatif par les professionnels de la psychiatrie de l’enfant et de l’adolescent (4, 5).

Avant le 11 mars 2020, date à laquelle l’OMS a qualifié l’épidémie de SARS-CoV-2 de pandémie, la santé mentale des adolescents était déjà préoccupante. En effet, les recours aux services pédopsychiatriques (étude Finlandaise) et aux urgences pédiatriques pour motifs pédopsychiatriques (étude Française) n’avaient cessé d’augmenter depuis des années (6, 7).

C’est dans ce contexte que la première vague de la pandémie de COVID-19 a été marquée par une diminution globale de l’offre de soins (fermeture programmée d’activités médicales ou chirurgicales) et du recours aux soins (baisse de fréquentation significative dans des services ayant maintenu un fonctionnement normal comme les services d’urgences pédiatriques), comme le montrent les exemples du Nord-Ouest de l’Italie (8) et du Sud-Est de la France (9).

Durant cette phase initiale de la pandémie, des arguments sur l’impact négatif en santé mentale (anxiété, dépression et stress posttraumatique au premier plan) ont été exposés (1) mais l’impact en terme de conduite suicidaire ne faisait pas l’unanimité. Une large étude (21 pays) mettait en évidence un nombre stable de suicide durant les premiers mois de la pandémie (10) et des auteurs Taiwanais révélaient même une réduction de 27% du nombre de suicides en 2020 (vs 2015 à 2019) chez les adolescents de 15 à 24 ans, probablement reliée, selon eux, à une gestion exemplaire de la pandémie et l’absence de confinement imposé à leur population (11).

Comment expliquer ce paradoxe initial : impact sur la santé mentale démontré et absence d’effet sur le nombre de suicidants et de suicides ? Pour y répondre, certains ont recherché des facteurs protecteurs durant la pandémie (bonne satisfaction en parentalité par exemple) ou des effets bénéfiques inattendus du confinement (temps passé en famille ou à pratiquer ses hobbies).

Cependant, avec le recul actuel dont nous disposons en décembre 2021, cette absence d’effet initial sur le taux de suicide de l’adolescent durant les premiers mois de la pandémie semble avoir relevé plus d’un effet d’optique lié, entre autres, à la réalisation d’étude sur un temps insuffisamment long.

Ainsi, une large enquête en ligne (> 60.000 adolescents de moins de 20 ans) sur une population d’adolescents Nord-Américains (Philadelphie) a mis en évidence une augmentation modérée mais significative des signes de dépression et du risque suicidaire en comparant la fin d’année 2020 (juin-décembre) vs la même période en 2019 (12). Cette étude n’étudiait pas les TS mais a pu mettre en évidence l’intérêt d’étudier le risque suicidaire sur un temps suffisamment long après le début de la pandémie. Par ailleurs, cette étude a mis en évidence que le sexe féminin était un facteur de risque (FDR) d’idéation suicidaire dans ce contexte (12). Ce FDR (sexe féminin) a également été démontré pour les TS dans une population d’adolescents Espagnols pour la période de septembre 2020 à mars 2021 durant laquelle le nombre de TS a augmenté de 25% par rapport à la même période l’année précédente (13). Enfin, le sexe féminin est également un FDR de suicide dans une population Japonaise où ce taux, après une relative stabilité les premiers mois de la pandémie, a augmenté de 49% pour les adolescents entre juillet et octobre 2020 (14).

Ainsi, à l’heure actuelle, une augmentation des TS de l’adolescent est notée de manière globale dans le monde : aux USA (15, 16), en Australie (17), en Italie (18), en Espagne (13) et en France (19) par exemple. Ce constat met un terme à une période initiale faussement rassurante (par manque de recul) et le temps a permis de collecter les arguments pour dire que, globalement, les TS de l’adolescents semblent augmenter.

Une fois cette alerte posée en ces termes, reconnaitre que nous ne disposons pas d’une explication totalement satisfaisante à ce phénomène semble nécessaire pour penser et élaborer des modèles d’études longitudinaux collaboratifs (échelle internationale) prenant en compte, en plus des dimensions environnementales (famille, école et société), la dimension développementale de l’expression des symptômes (20) et des hypothèses étiopathogéniques translationnelles.

Il apparait important d’améliorer notre compréhension des mécanismes qui sous-tendent les comportements suicidaires à l’adolescence qui ne pourra se limiter à l’étude de l’impact des mesures socio-économiques de lutte contre la pandémie et ceci afin d’adapter au mieux nos parcours de soin à ces nouvelles demandes.

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Les traumatismes cumulatifs dans l’enfance. Revue des principales études épidémiologiques de 2019 et 2020 sur leurs impacts cliniques, somatiques, sociaux et familiaux

Gindt, M.1, 2, 3, Menard, M-L. 1, 2, 3, & Askenazy, F. 1, 2, 3

  1. Service Universitaire de l’Enfant et de l’Adolescent, Hôpitaux Pédiatriques de Nice CHU-Lenval, Nice, France
  2. Laboratoire CoBTek, Université Côte d’Azur, Nice, France
  3. Centre Expert du Psychotrauma PACA Corse

Nous remercions la société française de psychiatrie de l’enfant et de l’adolescent ; la fondartion de France ; l’association promenade des anges qui soutiennent nos actions.

Les enfants et les familles sont soumis à des expériences traumatiques collectives et / ou individuelles de plus en plus fréquentes. Notre expérience de terrain nous a rendu particulièrement à l’écoute de leurs impacts. En effet, les populations vivant à Nice et ses alentours ont subi un des plus importants attentats terroristes de la décennie en 2016. En 2020, le mois d’octobre à vue se succéder dans le contexte de la pandémie à la Covid-19, une catastrophe secondaire à un aléa climatique majeur faisant plus de 20 morts et laissant sans domicile plusieurs milliers de personnes, puis dans les 15 jours suivants un nouvel attentat terroriste à l’église Notre-Dame au cœur de Nice faisant 3 morts. Ainsi, les deux artères principales de la ville ont été le théâtre de deux attentats terroriste meurtriers.

Notre équipe sera en mesure dans quelques mois de présenter sur ce site les premiers résultats des études épidémiologiques réalisées dans les populations pédiatriques impactées par ces traumatismes cumulatifs.

Nous proposons ici, une revue de littérature qui a pour objet de réaliser une veille scientifique, sur les données les plus récentes dans ce domaine, elle est neutre et a pour but d’informer les professionnels laissant à chacun le choix de son avis sur ces résultats.

La présence d’un événement traumatique est retrouvée chez 43,7% des enfants et des adolescents, et 8,9% se caractérisent par 4 traumatismes ou plus [1]. Parmi ces traumatismes, on retrouve le plus souvent l’usage de drogue ou d’alcool chez les parents avec un contexte de violence familiale associé, la négligence ou les abus émotionnels [1]. Ces événements traumatiques dans l’enfance affectent le développement affectif, cognitif et psychologique de l’enfant [2].

Ces expériences vécues par l’enfant peuvent être un épisode unique, des événements récurrents ou bien multiples. Parmi les événements récurrents ou multiples, la littérature distingue le traumatisme cumulatif et les expériences d’adversité. Le traumatisme cumulatif renvoie au fait de vivre plusieurs expériences traumatisantes différentes, alors que les expériences d’adversité renvoient à des événements récurrents comme la maltraitance ou bien des dysfonctionnements familiaux importants (violences conjugales, par exemple).

Traumatismes cumulatifs de l’enfance : impact sur la clinique

Dans l’enfance

Le stress dans l’enfance est connu pour altérer le développement cérébral des enfants [2 ; 3]. Certaines études réalisées montrent que la présence de stress chronique dans l’enfance peut générer des différences au niveau neuro-anatomique, en particulier une réduction du volume de l’hippocampe et du corps calleux [4]. Ces modifications anatomiques sont corrélées avec des dysfonctionnements cognitifs [4].

Des études ont démontré qu’un enfant sur cinq, victime d’une agression violente dans l’enfance, revivait une nouvelle ou plusieurs agressions dans les cinq ans après la première [5]. La pathologie psychiatrique la plus fréquemment retrouvée dans les suites d’expériences traumatiques récurrentes dans l’enfance est le trouble de stress post-traumatisme (TSPT) [6 ; 7]. Les principales comorbidités sont le trouble déficitaire de l’attention (60%) et les troubles du sommeil (53%) [6].

Les traumatismes cumulatifs conduisent généralement au développement de TSPT, avec un tableau clinique dominé par la suractivation neurovégétative et des difficultés émotionnelles [8]. Toutefois, certains types d’exposition traumatique peuvent moduler cette expression clinique. Ainsi, les agressions sexuelles prolongées dans l’enfance seraient associées avec des tableaux cliniques de personnalité borderline sévères [9].

Des corrélations sont également retrouvées entre le nombre de traumatisme et les pathologies psychiatriques à l’adolescence et à l’âge adulte [1]. Ainsi, plus les expériences traumatiques dans l’enfance sont répétées, plus le risque de développer un état dépressif ou anxieux ou encore des conduites agressives est élevé au cours de la vie [1].

A l’âge adulte

Tout comme pour les populations pédiatriques, les traumatismes cumulatifs de l’enfance augmentent le risque d’être à nouveau confronté à un événement traumatique à l’âge adulte, surtout le fait d’être victime d’une agression physique [10].

Les traumatismes cumulatifs vécus dans l’enfance sont également impliqués dans le développement de pathologies psychiatriques. En particulier, ils prédisent la survenue à l’âge adulte de TSPT complexe avec épisode dissociatif [11-14]. Les traumatismes cumulatifs dans l’enfance sont associés aussi au diagnostic de schizophrénie [15], ainsi qu’aux épisodes psychotiques sévères [16] à l’âge adulte.

Par ailleurs, Cloitre et al. (2020) ont mis en évidence que le type de traumatisme cumulatif vécu dans l’enfance pouvait modifier la symptomatologie [17]. Ces auteurs ont voulu prédire les risques de développer un TSPT ou un TSPT complexe. Le TSPT complexe renvoie aux quatre symptômes principaux du TSPT, mais comprend en plus : un problème dans la régulation des affects, une altération des croyances sur soi et/ ou un sentiment de honte ou de culpabilité, et des difficultés à entretenir des relations ou à se sentir proche des autres [18]. Leurs résultats indiquent que si les enfants vivent un traumatisme intrafamilial, il y a des risques élevés de développer un TSPT complexe à l’adolescence ou à l’âge adulte (Diagnostic International Classification of Diseases and Related Health Problems : ICD 11), alors que les agressions physiques ou sexuelles extra-familiales augmentent le risque de TSPT (diagnostic ICD 11) [17].

Traumatismes cumulatifs de l’enfance : impact sur les troubles somatiques

Dans l’enfance

Les traumatismes cumulatifs dans l’enfance augmentent le risque de survenue de problèmes cardiovasculaires, de cancer, d’arthrose ou encore de trouble métabolique. Certains travaux soulignent une association entre la présence d’événements traumatiques multiples dans l’enfance et une augmentation de l’inflammation [19]. Cette donnée est d’autant plus importante que l’hypothèse inflammatoire dans les troubles psychiatriques notamment les troubles de l’humeur et la schizophrénie est de plus en plus discutée, comme récemment dans le cours de la pandémie de SARS –COV 2 [20].

Par ailleurs, il est bien connu que l’association de traumatismes cumulatifs et d’un fonctionnement familial de mauvaise qualité est lié à de nombreuses formes de « somatisations », en particulier de la fatigue, des migraines, une augmentation du rythme cardiaque, des nausées, des douleurs au niveau du dos ou musculaires [21].

A l’âge adulte

Tout comme chez les enfants, il a été mis en évidence que la présence de traumatisme cumulatif dans l’enfance rend plus sensible le système inflammatoire [22] et prédit les risques d’inflammation chronique [23]. Il a été montré que la présence d’antécédents traumatiques multiples augmente le risque de diabète de type II chez les femmes ; cependant, cette association n’est pas retrouvée chez les hommes [24].

Selon Riedl et al., les problèmes de santé à l’âge adulte seraient corrélés au nombre de traumatisme vécu dans l’enfance [25]. Les adultes ayant vécu plus de quatre traumatismes dans l’enfance auraient plus de problèmes de santé à l’âge adulte, dont des troubles musculo-squelettiques, des douleurs chroniques des maladies gastro-intestinales, des maladies métaboliques et des maladies respiratoires [25].

Traumatismes cumulatifs de l’enfance : impact sur la périnatalité et la petite enfance

A la naissance, le poids du bébé est inférieur d’environ 16 g lorsque la mère a été victime dans son enfance d’abus sexuels et / ou physiques répétés [26]. L’âge gestationnel est également légèrement plus court lorsque la mère a été impactée par des traumatismes cumulatifs [26].

Par ailleurs, il apparaît que l’augmentation du nombre de traumatisme dans l’enfance de la mère diminue par la suite le bien-être maternel [27]. La présence de traumatisme cumulatif dans l’enfance diminuerait la capacité d’empathie des mères face à leurs enfants [28]. Les mères ayant un passé de maltraitance dans l’enfance auraient tendance à utiliser une régulation émotionnelle négative face à leurs bébés et leur « état d’esprit » serait également plus négatif [29].

Traumatismes cumulatifs de l’enfance : impact sur la relation parent-enfant

En 2020, Greene et al. indiquent que les parents présentant des antécédents de maltraitance dans l’enfance ont un risque plus élevé de se montrer négligents ou abusifs avec leur enfant [30]. De plus, les auteurs signalent que ces parents sont à risque de reproduire les épisodes de maltraitance de leur enfance en devenant à leur tour des parents maltraitants [30]. D’une manière similaire, les parents ayant été exposés à des scènes de violences conjugales dans l’enfance sont plus à risque de reproduire ou de revivre ces scènes à l’âge adulte [31]. Enfin, Goodrum et al. se sont intéressés au rôle du type d’expériences traumatiques vécus dans l’enfance sur la parentalité ultérieure [32]. Ils indiquent que les parents ayant vécu des maltraitances ou des abus sexuels dans l’enfance ont tendance à moins s’impliquer dans l’éducation de leurs enfants. Les parents ayant subi des violences émotionnelles ont tendance à avoir une mauvaise qualité au niveau de la relation parents-enfant [32].

D’autres études ont porté sur les populations des jeunes adultes, entre 16 et 20 ans et les risques de problèmes judiciaires suites à des antécédents de traumatisme cumulatif dans l’enfance. Ces études mettent en évidence que parmi les enfants impliqués dans des délits ou des agressions, on retrouve des jeunes ayant vécu de nombreux traumatismes cumulatifs [33]. Par exemple, le fait d’avoir un parent incarcéré est corrélé avec une augmentation de la criminalité dès l’adolescence [34], mais semble également augmenter le risque de vivre des traumatismes (risque multiplié par trois) [35].

Les traumatismes répétés familiaux dans l’enfance peuvent générer un sentiment de marginalisation conduisant à des conduites d’isolement et à un manque d’appartenance [36].

Traumatismes cumulatifs de l’enfance : Facteurs de risque et/ ou de protection

Si les traumatismes cumulatifs dans l’enfance pourraient prédire l’apparition de pathologies psychiatriques chez les enfants, les adolescents et les adultes, il existe pour autant des facteurs pouvant moduler ces symptômes ultérieurs. Parmi ces facteurs, on retrouve la régulation émotionnelle. Face à un événement traumatique si la régulation émotionnelle est adaptée, elle serait un facteur de protection ; à l’inverse, si elle ne l’est pas, il s’agit d’un facteur de risque [37]. D’une la même façon, le soutien social, les compétences scolaires ou encore personnelles peuvent être à la fois des facteurs de protection ou bien des facteurs de risque [38]. Enfin, le fonctionnement familial est également impliqué dans les variations individuelles apparaissant dans la vulnérabilité aux pathologies mentales ultérieures. Après un vécu traumatique, 23,4% des familles présentent une mauvaise adaptation. Cette mauvaise adaptation entraîne un risque plus élevé de revivre un traumatisme. Elle est également impliquée dans le développement de pathologie, en particulier le TSPT [39].

 

Conclusion

Cette revue souligne l’importance des conséquences des traumatismes cumulatifs pour le sujet tant au niveau de la santé somatique, mentale, que dans la vie familiale et sociale.

En pratique courante, il parait nécessaire d’évaluer de manière systématique la présence d’antécédents traumatiques quel que soit l’âge de l’individu [40]. Bon nombre de cliniciens ont des difficultés à effectuer ces dépistages, jugés trop invasifs. Pour autant, dans notre expérience de terrain au Centre Expert Pédiatrique du Psychotraumatisme – Centre Simone Veil à Nice, les enfants comme les parents, acceptent volontiers cette évaluation. Les modalités pratiques de l’évaluation dans le cadre du psychotraumatisme pédiatrique sont très importantes. En effet, l’évaluation doit s’intégrer au parcours de soin proposé pour les victimes. Ainsi, cliniciens de terrains et chercheurs cliniciens travaillent ensemble dans un même espace et une même temporalité. La qualité de l’accueil, de l’écoute du clinicien chercheur lui-même formé à la pratique du psychotraumatisme pédiatrique est une condition à la réussite de ce travail de maillage entre l’évaluation et les indications pour les parcours de soins.
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COVID 19 – Actualités Scientifiques dans le domaine de la psychiatrie de l’enfant et de l’adolescent

Août 2020
Morgane Gindt1,2,3, Arnaud Fernandez1,2,3, & Florence Askenazy1,2,3

  1. Service Universitaire de l’Enfant et de l’Adolescent, Hôpitaux Pédiatriques de Nice CHU-Lenval, Nice, France
  2. Laboratoire CoBTek, Université Côte d’Azur, Nice, France
  3. Centre Expert du Psychotrauma PACA Corse

La COVID-19 (Corona Virus Disease 2019) est une maladie hautement infectieuse, qui est causée par le Sars-Cov-2 (Severe Acute Respiratory Syndrome Coronavirus 2) [1]. L’Organisation mondiale de la santé (OMS) a annoncé le 30 janvier 2020 que la COVID-19 était une urgence de santé publique de portée internationale. De plus, en raison de la longue période d’incubation de la COVID-19, de la facilité de transmission et du manque d’interventions pharmacologiques [2 ; 3], les gouvernements ont dû mettre en œuvre des interventions de distanciation physique extraordinaires pour ralentir la propagation du virus. En France, un confinement à domicile a été mis en place pendant près de deux mois (du 17 mars au 11 mai 2020).

La majorité des études publiées dans le domaine de la santé mentale et/ou des troubles psychiatriques liés à la pandémie et/ou aux conséquences des mesures de lutte, et/ou aux conséquences de l’infection, concernent les populations adultes. Pour les populations pédiatriques, la littérature commence à émerger.

Pendant le confinement lié à la Covid-19, des études chinoises (menées sur 52730 personnes) montrent que 35% des participants adultes ont présenté un stress modéré et 5,14% un stress sévère [4]. L’incertitude et la faible prévisibilité de la COVID-19 ne menacent pas seulement la santé physique des gens, mais affectent également leur santé mentale [5 ; 6].

Les études réalisées en population adulte, lors des premiers mois de l’épidémie de la COVID-19 ont révélé des associations entre l’apparition de cette maladie et l’augmentation de l’anxiété, de la dépression et du stress [7-9]. De plus, conformément aux recherches sur les conséquences psychologiques de la COVID-19 en Chine [7-9] et aux recherches sur les pandémies antérieures [10 ; 11], l’impact perçu de la COVID-19 sur la vie quotidienne était associé à un état anxieux pour le domaine de la santé plus important. Ces résultats sont dupliqués par la plupart des études dans d’autres pays (Etats-Unis, pays asiatiques et européens) [12]. Li et al. (2020) ont constaté que les gens montraient plus d’émotions négatives (anxiété, dépression et indignation) et moins d’émotions positives pendant la crise sanitaire de la COVID-19.

Concernant les mesures de quarantaine qui découlent des épidémies, elles s’accompagnent également de conséquences psychologiques et psychiatriques négatives. Tull, Edmonds, Scamaldo et al. [13] ont constaté que le fait de devoir rester à la maison, suite à une décision gouvernementale, était associé à un niveau plus élevé d’anxiété et de solitude. Ces conséquences négatives sont étroitement liées à ce type d’injonctions, tant d’un point de vue théorique [14], que pratique [15].

Les études réalisées en population pédiatrique sont moins nombreuses, mais semblent converger vers les mêmes résultats [16]. Par exemple, Saurabh & Ranjan [17] ont montré que les enfants et adolescents mis en quarantaine souffraient de détresse psychologique, comme l’inquiétude (68,59%), l’impuissance (66,11%) et la peur (61,98%). Parmi les symptômes les plus fréquemment cités par les enfants et les adolescents pendant la quarantaine, on retrouve : le « collage » aux parents (37%), l’inattention (33%), l’irritabilité (32%), l’inquiétude (28%) et les comportements obsessionnels (27%). Les autres symptômes comprennent la peur de la mort d’un proche (22%), les troubles du sommeil (22%), le manque d’appétit (18%), la fatigue (17%), les cauchemars (14%) et l’inconfort / agitation (13%) [18 ; 19]. Une enquête menée aux États-Unis (n = 137) a révélé que 40,1% des parents ont déclaré avoir observé des signes de détresse chez leurs enfants [20]. Les pathologies psychiatriques pouvant apparaître dans les suites du confinement sont : la dépression (43.7%), le trouble de stress post-traumatique (TSPT) (30%), le trouble de l’adaptation (16.7%) et le deuil pathologique (16.7%) [21-23]. Concernant les troubles anxieux, l’étude de Duan, Shao, Wang et al. [24] indique, à l’aide de la Spence Child Anxiety Scale (SCAS) un niveau élevé d’anxiété chez les enfants (moyenne = 21.68, ET = 25.88) et les adolescents (moyenne = 25.56, ET = 19.32). Chez les enfants, on retrouve une forte anxiété de séparation (moyenne = 4.4 ; ET = 3.3) et la peur des blessures physiques (moyenne = 3.93 ; ET = 2.76). Chez les adolescents, des troubles paniques (moyenne = 4.25 ; ET = 5) et de l’anxiété généralisée (moyenne = 4.61 ; ET =3.49) sont observés. Enfin, pour les deux groupes d’âge, le score pour les phobies sociales est important (enfant : moyenne = 4.15 ; ET = 3.24 et adolescent : moyenne = 5.60 ; ET = 4.03).

Il apparaît que les symptômes dépressifs et anxieux sont corrélés au temps de confinement, avec des taux plus élevés lorsque le confinement dépasse 10 jours [25].

Ces différents symptômes peuvent s’expliquer par plusieurs facteurs dont le changement de mode de vie [26 ; 27], par la réduction des échanges sociaux [28] et par l’exposition répétée aux médias et aux informations [29 ; 30]. La fermeture des écoles, le manque d’activité en plein air, les habitudes alimentaires et de sommeil aberrantes sont susceptibles de perturber le mode de vie habituel des enfants et peuvent potentiellement favoriser la monotonie, la détresse, l’impatience, la gêne et diverses manifestations psychiatriques [31]. Par ailleurs, la détresse des parents et/ou tuteurs de l’enfant pendant la crise sanitaire et le confinement étaient corrélée avec l’augmentation des problèmes psychologiques et psychiatriques des jeunes enfants [32].

Pour de nombreux enfants, la pandémie actuelle entraine des risques de traumatismes cumulatifs ; ils sont exposés à de multiples facteurs de risque concomitants qui augmentent la probabilité de problèmes de maladie psychiatrique (p. Ex. Perte d’emploi des parents, conflit conjugal) [33]. Enfin, il a été constaté que les incidents de violence domestique et de maltraitance d’enfants étaient en augmentation pendant le confinement [27 ; 31]. Cette dernière observation est déjà corroborée par les remontées cliniques de terrain et doit retenir toute notre attention.

Par le passé, des situations épidémiques exceptionnelles (épidémie H1N1, en 2009 ou épidémie du virus Ebola en Afrique, ces dernières années) ont également favorisé le développement de TSPT (Trouble de Stress Post Traumatique) [34]. Cependant, face à ce contexte sanitaire et aux nombreux résultats d’études, plusieurs chercheurs notent les limites actuelles des diagnostics psychiatriques catégoriels (DSM-5 ou la CIM 11), en particulier concernant le TSPT en population pédiatrique. En effet, dans la cadre du TSPT, le développement de cette pathologie est directement lié à l’exposition à un événement traumatique. Ce dernier est un événement concret qui génère une menace vitale pour l’individu, de manière directe (implication dans l’événement) ou indirecte (témoin de l’événement). La crise sanitaire actuelle et les mesures qui en découlent (interruption de l’école, quarantaine ou confinement), ainsi que ces conséquences (perte d’emploi ou encore crise économique) ne correspondent pas en tout point à la définition du DSM-5 ou de la CIM 11. Pour autant, les conséquences cliniques observées et les résultats des études montrent bien le développement de troubles psychiatriques liés à l’exposition à un traumatisme. De ce fait, Horesh et Brown [35] proposent d’établir un consensus pour appréhender cette crise sanitaire comme un événement traumatique.

Par exemple, pour les enfants de la région Niçoise (France), la crise sanitaire actuelle et les mesures de quarantaine qui en ont résulté peuvent également générer une réactivation de la peur et des symptômes du TSPT, qui peuvent s’être manifestés au lendemain du 14 juillet 2016. À l’époque de cet événement violent, plus de 30000 personnes étaient présentes sur la Promenade des Anglais, avec un grand nombre de bébés, d’enfants et d’adolescents [36]. Lors de cet événement, plusieurs enfants ont été confinés avec leurs parents, dans des restaurants ou dans des appartements autour de la Promenade des Anglais, en attendant que le danger passe. Pour certaines familles, cet enfermement s’est poursuivi pendant plusieurs semaines, de peur qu’une nouvelle attaque ne se produise. Le confinement et ce que représente la pandémie pourrait –ils conduire à une réactivation traumatique ? Des données dans d’autres conditions de catastrophes collectives pointent ce risque dans des populations pédiatriques [37]. Il de plus reconnu que la réponse d’un enfant à une situation de crise dépend de son exposition antérieure à d’autres événements traumatiques [38 ; 39].

Pour autant, certains chercheurs rappellent que le confinement a également pu apporter des bienfaits aux enfants et aux familles. Une diminution du stress quotidien, une modification des routines familiales, une diminution des pressions scolaires et sociales ou encore une réduction des conflits entre pairs ont été notés [6 ; 40]. Ces changements  semblent  avoir permis de réduire certains symptômes et d’améliorer leurs sentiments de bien-être [6].

Il est important pendant cette période de crise sanitaire que les professionnels de santé puissent accompagner les enfants et les familles vers un processus de « résilience ». La résilience n’est pas simplement un trait des individus (quelque chose « qu’ils ont en eux »), mais plutôt le reflet des processus et des ressources qui permettent de conserver un équilibre, de compenser les défis et de favoriser l’adaptation aux conditions difficiles [33 ; 41]. La résilience émerge de systèmes adaptatifs ordinaires tels que des relations étroites avec des adultes et des pairs compétents et attentionnés, des écoles et des communautés efficaces, des opportunités de réussite et des croyances en soi [42].

L’absence d’harmonisation des décisions internationales concernant les mesures de lutte contre la pandémie ne facilite pas la lecture des résultats, ni la possibilité de mettre en place des études de collaboration entre les pays. La généralisation des résultats risque d’être une complexité méthodologique importante que les études soient de nature qualitatives ou quantitatives. L’Agence Nationale de la Recherche a lancé un programme de financement sur la thématique de la COVID 19 permettant d’aider les laboratoires de recherche. La mise en place rapide de recherche dans ce domaine est un enjeu important pour les populations pédiatriques et leur devenir afin de cibler au mieux la prévention puis la thérapeutique.

Récapitulatif des principaux résultats

  • Le Covid-19 affecte la santé physique, mais aussi la santé mentale des individus.
  • Les études en population pédiatrique commencent à émerger et semblent mettre en évidence la présence de fortes émotions négatives (tristesse, inquiétude et peur).
  • Plusieurs symptômes sont également apparus pendant le confinement pouvant conduire à des pathologies psychiatriques comme la dépression ou le trouble de stress post-traumatique, chez l’enfant et l’adolescent.
  • Cette crise sanitaire génère un risque accru de traumatismes cumulatifs, en particulier dans des régions préalablement impactées par des traumatismes collectifs. Les violences domestiques et les signalements de cas de maltraitance sont en augmentation depuis le confinement.

 

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Comment valoriser la recherche qualitative en psychiatrie de l’enfant et de l’adolescent ?

Jonathan LACHAL, Juin 2019

La recherche qualitative, théorisée dans les années 1960 en sociologie, ne cesse de se développer dans la recherche médicale (1,2). La recherche qualitative est protéiforme et son corpus théorique est très riche. Pour la définir, il est nécessaire de la considérer selon (3,4) :

  1. Son objectif : celui de générer des hypothèses théoriques. A partir de questions comme pourquoi, comment, qu’est-ce que cela veut dire ? on cherche à concevoir et développer, en explorant l’expérience personnelle et du point de vue des participants, des théories qui aident à comprendre des phénomènes (sociaux, médicaux, mixtes ou autres) dans leur environnement naturel plutôt que dans des conditions expérimentales.
  2. La prise en compte nécessaire de la subjectivité du chercheur, inhérente au processus de recherche. La subjectivité est assumée et utilisée dans l’interprétation des résultats. Le point de vue du chercheur, associé à celui du participant, va permettre de construire des hypothèses théoriques plus complexes et plus pertinentes. L’implication du chercheur va permettre d’enrichir les résultats, et de produire des hypothèses plus complètes et plus fortes. Cette position contraste avec la position considérée comme extérieure du chercheur quantitatif vis­-à-vis de son dispositif expérimental.
  3. L’importance donnée au contexte dans lequel les participants évoluent. L’accent est mis sur l’analyse approfondie du contexte par un petit nombre de personnes concernées (5). La population à étudier est échantillonnée de manière à favoriser la diversité des points de vue et enrichir les données dans ce contexte propre à la question de recherche. Les éléments contextuels sont essentiels à la compréhension fine du processus complexe. La généralisation est théorique et non pas statistique.

Les méthodes qualitatives sont utilisée dans de nombreuses situations en recherche médicale : lorsque la question de recherche est complexe, lorsque l’on souhaite éclairer des processus ou des questions personnelles ou intimes, ou encore lorsque l’on étudie de situations nouvelles ou source de divergences (6). En psychiatrie, Stanghellini et Ballerini (2008) proposent cinq principales indications :

  • la formulation d’hypothèses et la conception d’outils de mesure (études exploratoires)
  • la confirmation de la pertinence en contexte clinique de conceptions psychopathologiques obtenues en laboratoire
  • l’évaluation en contexte clinique de dysfonctions cognitives et leur lien avec la pathologie
  • la proposition de nouvelles perspectives sur des phénomènes cliniques déjà étudiées par la recherche classique
  • la clarification du rôle de certaines variables d’un phénomène lorsque la recherche classique obtient des résultats inconsistants (7).

De plus en plus d’études qualitatives sont publiées dans des revues scientifiques à comité de lecture (pour des exemples, se référer à (8–15). Aujourd’hui, trois perspectives se dessinent dans la valorisation des techniques qualitatives (16) :

  1. Les études qualitatives autonomes. De nombreuses situations de recherche ne se prêtent pas à un design quantitatif : population d’étude réduite, thématique complexe ou peu étudiée, objectif de compréhension et pas d’obtention d’une preuve statistique, insuffisance du soin ou des éléments théoriques explicatifs, volonté d’explorer l’expérience de participants… Dans ces situations, les études qualitatives possèdent de nombreux atouts : facilité de la mise en place, peu onéreuses, faible nombre de participants nécessaire, design souple et adaptable au fur et à mesure de la recherche, richesse des descriptions obtenues. Le design qualitatif se suffit alors à lui-même, et les résultats peuvent être publiés dans des revues importantes, et utilisées dans la compréhension théorique, la recherche, mais aussi dans la pratique quotidienne.
  2. Les études mixtes, le dialogue du qualitatif et du quantitatif (quali/quanti). Les études qualitatives peuvent également être associées à des protocoles quantitatifs : on parle alors d’études mixtes. De nombreuses techniques permettent d’intégrer les volets qualis/quantis au niveau de la méthode, de l’échantillonnage, ou des résultats. La partie quali peut ainsi se dérouler en amont pour préciser la question de recherche et le protocole quanti (design exploratoire), en aval pour expliquer les résultats obtenus avec la partie quanti (design explicatif) ou concomitamment au quanti pour compléter, préciser, et obtenir des données non accessibles au quanti comme par exemple l’expérience ou l’évaluation subjective de l’objet d’étude. Pour exploiter l’intérêt des deux approches, une étude mixte doit toujours être portée par des spécialistes de chaque méthode (17).
  3. Les métasynthèses ou qualitative evidence synthesis (QES) (3,4). Lorsque la somme des publications qualitatives sur une thématique devient suffisamment importante, les QES sont utiles pour l’amélioration des pratiques (18). On peut les définir comme des études qualitatives d’études qualitatives, où le matériel analysé est le contenu des articles récupérés lors de la revue de littérature. Certaines méthodes permettent même d’associer revue quantitatives et qualitatives (QES mixtes (19)). Les QES sont de plus en plus utilisées en santé publique pour la définition des grandes orientations de politiques de santé, car elles offrent un regard scientifique, rigoureux, et complémentaire aux essais randomisés et méta-analyses.

De nombreuses perspectives se dessinent aujourd’hui, autour notamment des designs multiphase (alternance d’étapes qualitatives et quantitatives répétées), du dialogue démarche idiographique qualitative – ambitions nomothétiques des big datas, ou encore dans les échanges plus intimes entre quali et quanti (systématisation de certaines étapes qualitatives, inclusion d’une dose de subjectivité dans les protocoles quantitatifs avec les designs bayésiens…). La psychiatrie de l’enfant et de l’adolescent française ne peut et ne doit pas rater ce rendez-vous. Mieux encore, elle gagnera à en être pionnière.

Références :

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  2. Lachal J, Revah-Levy A, Orri M, Moro MR. Metasynthesis: An Original Method to Synthesize Qualitative Literature in Psychiatry. Front Psychiatry [Internet]. 2017 Dec 1 [cited 2017 Dec 1];8. Available from: http://journal.frontiersin.org/article/10.3389/fpsyt.2017.00269/full
  3. Lachal J. La métasynthèse : une méthode de synthèse des données qualitatives appliquée aux soins psychiques de l’adolescent [Thèse de doctorat, psychologie]. [Paris]: Paris Descartes Sorbonne Paris Cité; 2016.
  4. Lefèvre H, Moro MR, Lachal J. Research in adolescent healthcare: the interest of qualitative methods. unpublished. 2019;
  5. Fossey E, Harvey C, McDermott F, Davidson L. Understanding and evaluating qualitative research. Aust N Z J Psychiatry. 2002 Dec;36(6):717–32.
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  7. Stanghellini G, Ballerini M. Qualitative analysis. Its use in psychopathological research. Acta Psychiatr Scand. 2008 Mar;117(3):161–3.
  8. Mahdi S, Viljoen M, Massuti R, Selb M, Almodayfer O, Karande S, et al. An international qualitative study of ability and disability in ADHD using the WHO-ICF framework. Eur Child Adolesc Psychiatry. 2017 Oct 1;26(10):1219–31.
  9. Reardon T, Harvey K, Young B, O’Brien D, Creswell C. Barriers and facilitators to parents seeking and accessing professional support for anxiety disorders in children: qualitative interview study. Eur Child Adolesc Psychiatry. 2018 Aug 1;27(8):1023–31.
  10. Canela C, Buadze A, Dube A, Eich D, Liebrenz M. Attitudes Toward Stimulant Treatment of Offspring of Adult Patients with Attention-Deficit/Hyperactivity Disorder. J Child Adolesc Psychopharmacol. 2017 Apr 19;27(5):422–8.
  11. Niemeyer L, Schumm L, Mechler K, Jennen-Steinmetz C, Dittmann RW, Häge A. “When I Stop My Medication, Everything Goes Wrong”: Content Analysis of Interviews with Adolescent Patients Treated with Psychotropic Medication. J Child Adolesc Psychopharmacol. 2018 Aug 27;28(9):655–62.
  12. Scahill L, Lecavalier L, Schultz RT, Evans AN, Maddox B, Pritchett J, et al. Development of the Parent-Rated Anxiety Scale for Youth With Autism Spectrum Disorder. J Am Acad Child Adolesc Psychiatry [Internet]. 2019 Feb 20 [cited 2019 May 17];0(0). Available from: https://www.jaacap.org/article/S0890-8567(19)30124-8/abstract
  13. Lachal J, Orri M, Sibeoni J, Moro MR, Revah-Levy A. Metasynthesis of Youth Suicidal Behaviours: Perspectives of Youth, Parents, and Health Care Professionals. PLOS ONE. 2015 May 22;10(5):e0127359.
  14. Lefèvre H, Schrimpf C, Moro MR, Lachal J. HPV vaccination rate in French adolescent girls: an example of vaccine distrust. Arch Dis Child [Internet]. 2017 Dec 8; Available from: http://adc.bmj.com/content/early/2017/12/08/archdischild-2017-313887.abstract
  15. Grandclerc S, Spiers S, Spodenkiewicz M, Moro MR, Lachal J. The Quest for Meaning Around Self-Injurious and Suicidal Acts: A Qualitative Study Among Adolescent Girls. Front Psychiatry [Internet]. 2019 Apr 5 [cited 2019 May 8];10. Available from: https://www.frontiersin.org/article/10.3389/fpsyt.2019.00190/full
  16. Lachal J. Expériences et narrativité à l’adolescence : méthodes qualitatives et quantitatives. [Mémoire pour l’obtention de l’Habilitation à Diriger des Recherches]. [Paris]: Paris Descartes Sorbonne Paris Cité; 2018.
  17. Pluye P, Bengoechea EG, Granikov V, Kaur N, Tang DL. Tout un monde de possibilités en méthodes mixtes: revue des combinaisons des stratégies utilisées pour intégrer les phases, résultats et données qualitatifs et quantitatifs en méthodes mixtes. Oser Défis Méthodes Mixte En Sci Soc Sci Santé. 2018;28.
  18. France EF, Cunningham M, Ring N, Uny I, Duncan EAS, Jepson RG, et al. Improving reporting of meta-ethnography: the eMERGe reporting guidance. BMC Med Res Methodol [Internet]. 2019 Dec [cited 2019 May 17];19(1). Available from: https://bmcmedresmethodol.biomedcentral.com/articles/10.1186/s12874-018-0600-0
  19. Hong QN, Pluye P, Bujold M, Wassef M. Les défis des revues systématiques mixtes: devis de synthèse convergents et séquentiels. Oser Défis Méthodes Mixte En Sci Soc Sci Santé. 2018;49.

 

La schizophrénie très précoce

Fabian Guénolé, Arnaud Fernandez, Juillet 2018

Près d’un tiers des schizophrénies débutent dans l’enfance ou à l’adolescence (Bronsard et al., 2016), ce qui justifie un intérêt minutieux des pédopsychiatres et de leurs collègues pour les spécificités de ces formes précoces. En insistant sur les connaissances récentes, nous proposons ici une brève synthèse concernant un sous-groupe particulier, celui des schizophrénies « très précoces », dont les aspects neurodéveloppementaux, diagnostiques et pronostiques sont différents des formes à début plus tardif.
Ce sous-groupe des schizophrénies très précoces, ou schizophrénies infantiles, est habituellement défini par un début avant 13 ans (Nicolson et Rapoport, 1999). Les cas sont rares, puisqu’on estime généralement que moins d’un enfant sur 10 000 en est atteint (Nicolson et Rapoport, 1999), avec une légère prédominance de garçons (Ordóñez et al., 2016).
Les symptômes et signes cliniques des schizophrénies très précoces sont globalement les mêmes que ceux des formes plus tardives (Hollis et al., 2013). Les hallucinations sont les manifestations principales ; elles existent dans au moins 3/4 des cas et sont presque toujours auditives (David et al., 2011) et volontiers polymodales (s’associant par exemple à des hallucinations visuelles dans près d’un tiers des cas). Les manifestations délirantes sont décrites comme moins présentes ou moins élaborées que pour les débuts à l’adolescence ou à l’âge adulte. Concernant les signes dits « négatifs », l’accent est mis sur l’émoussement affectif ou la discordance des affects, mais l’ensemble des signes de type déficitaire , dits « négatifs », serait présent de façon plus sévère que dans les formes à début plus tardif. Une spécificité des schizophrénies très précoces semble être leur histoire naturelle : un début insidieux dans la grande majorité des cas (contrairement, là encore, aux débuts plus tardif), et une évolution linéaire, sans épisodes psychotiques francs, généralement dans le sens d’une aggravation jusqu’à l’âge adulte.
Du fait que le trouble débute relativement tôt au cours du développement et s’associent à des problèmes majeurs de comportement, les enfants atteints de schizophrénie connaissent une limitation de leur parcours scolaire ainsi que de leur socialisation, ce qui augmente le retentissement du trouble, et en fait la forme la plus sévère de schizophrénie à terme.
On retrouve fréquemment des anomalies neurodéveloppementales prémorbides dans la petite enfance des enfants atteints de schizophrénie très précoce : trouble du développement moteurs, de la communication, des apprentissages et de la sociabilisation. Si leur présence n’a pas de valeur diagnostique particulière actuellement, ces anomalies neurodéveloppementales sont corrélées à la sévérité du pronostic de ces patients (Driver et al., 2013).
L’équipe du Pr Judith Rapoport, qui a étudié depuis maintenant 25 ans le diagnostic de la schizophrénie très précoce au sein de la branche pédopsychiatrique du National Institute of Mental Health (NIMH) dans la région de Washington aux USA, recommande une observation hospitalière à visée diagnostique de 2 à 3 semaines comportant une fenêtre pharmacologique, et souligne l’importance de l’expérience pratique des cliniciens et de réévaluations régulières plus que de questionnaires ou d’échelles particuliers (Gochman et al., 2011) – qui sont en revanche utiles pour la surveillance de l’efficacité et de la tolérance du traitement médicamenteux : Échelle d’Évaluation des Symptômes Positifs, Échelle d’Évaluation des Symptômes Négatifs, Échelle de Mesure des Mouvements Involontaires Anormaux (Driver et al., 2013). Il faut signaler que les hallucinations auditives sont un symptôme assez fréquent et de signification variée chez l’enfant, et que le diagnostic de schizophrénie très précoce ne doit pas reposer sur ce seul symptôme (Jardri et al., 2014).
Ce tableau clinique prototypique de la schizophrénie très précoce évoque finalement celui de l’hébéphrénie, décrite par Hecker à la fin du XIXe siècle, mais avec un début plus jeune. Il se distingue en tout cas de la notion de schizophrénie infantile telle qu’elle fût utilisée jusque dans les années 1950 pour désigner des cas à présent rattachés à l’autisme (Bender, 1947), même si la frontière n’est pas complète dans certains cas (Driver et al. 2013). Ce chevauchement diagnostique est par exemple présent chez 27% des patients (cohorte NIMH, Rapoport et al. 2009) qui présentaient des critères  précoces d’autisme avant que le diagnostic de schizophrénie infantile ne soit posé plus tardivement, lors d’une décompensation psychotique.
Dans la recherche du diagnostic différentiel d’une schizophrénie très précoce, la première chose est d’exclure une cause neurologique ou générale, principalement les encéphalites auto-immunes ou infectieuses, les tumeurs cérébrales et  certaines maladies métaboliques et génétiques rares. Ceci doit faire l’objet d’investigations cliniques et paracliniques hiérarchisées, le diagnostic de schizophrénie très précoce étant un diagnostic d’exclusion (Giannitelli et al., 2017).
Sur le plan étiologique, si l’abord génétique de la schizophrénie est une idée déjà ancienne (études des jumeaux, haute héritabilité…), notre compréhension de l’architecture génétique des formes précoces évolue (et se complexifie) avec les innovations technologiques récentes. Nous savions déjà que plus de 10% des patients atteints de schizophrénie très précoce présenteraient des anomalies cytogénétiques (macrolésions), contre moins d’1% dans la population générale, avec au premier plan les variations du nombre de copie des gènes (CNV) dont les syndromes de délétion 22q11.21 (Nicolson et al., 1999 ; Addington et al., 2009). Cependant, ces macrolésions génomiques ne sont ni nécessaires ni suffisantes à expliquer l’émergence du trouble et la plupart des CNV ne sont pas spécifiques de la schizophrénie mais retrouvés également dans d’autres troubles neurodéveloppementaux comme le trouble du spectre de l’autisme. Les facteurs environnementaux, largement étudiés, sont également à prendre en compte en interaction avec les anomalies génétiques et se répartissent globalement en facteurs périnataux, infectieux, sociaux et toxiques (Brown, 2011). Plus récemment, de nouvelles mutations non héritées (« de novo »), appelées polymorphismes d’un seul nucléotide (SNP), ont également été impliquées dans la genèse de la schizophrénie très précoce en utilisant le séquençage de l’ADN à haut débit (Ambalavanan et al., 2016). Ces résultats soulignent encore d’avantage la grande hétérogénéité génétique de la schizophrénie.
Le traitement de la schizophrénie très précoce n’a pas véritablement de codification propre. (Hollis et al., 2013). Par transposition des connaissances obtenues pour les formes à début plus tardif, la mise en œuvre d’un traitement médicamenteux antipsychotique est la règle, cependant très peu de travaux ont étudié les différents aspects d’efficacité et de tolérance dans cette population spécifique. On peut signaler toutefois que la clozapine semble un bon traitement médicamenteux de troisième ligne, utilisé probablement de façon trop tardive dans certains cas (Kasoff et al., 2016).
On ne dispose pas non plus de beaucoup de données scientifiques sur les aspects non pharmacologiques du traitement des schizophrénies très précoces (Hollis et al., 2013 ; Armando et al., 2015). Ceci ne doit pas pour autant empêcher la mise en œuvre précoce de soins les plus intensifs possibles, qui peuvent s’inspirer des méthodes reconnues chez les adolescents et les jeunes adultes (psychothérapie familiale, psychoéducation individuelle et familiale, psychothérapies) ou pour d’autres troubles mentaux de l’enfance.
Beaucoup reste à rechercher concernant les schizophrénies très précoces, en particulier dans les domaines étiologique et thérapeutique, et seules des collaborations entre services de psychiatrie de l’enfant et de l’adolescent pourront le permettre ; nous pouvons d’ores et déjà nous appuyer sur des principes diagnostiques solides et avoir à l’esprit la nécessité d’un investissement thérapeutique intensif pour ces jeunes patients et leurs familles.

Fabian Guénolé
Arnaud Fernandez

Références :

Addington AM, & Rapoport JL. The genetics of childhood-onset schizophrenia: when madness strikes the prepubescent. Curr psychiatry rep 2009 ;11(2), 156-161.

Ambalavanan A., Girard S. L., Ahn K., Zhou S., Dionne-Laporte A., Spiegelman D., … & Dion P. A. (2016). De novo variants in sporadic cases of childhood onset schizophrenia. European Journal of Human Genetics, 24(6), 944.

Armando M, Pontillo M, Vicari S. Psychosocial interventions for very early and earlyonset schizophrenia: a review of treatment efficacy. Curr Opin Psychiatry 2015;28:312–23.

Bender L. Childhood schizophrenia: clinical study of one hundred  schizophrenic children. Am J Orthopsychiatry 1947;17:40-56.

Bronsard G, Alessandrini M, Fond G, Loundou A, Auquier P, Tordjman S, Boyer L. The Prevalence of Mental Disorders Among Children and Adolescents in the Child Welfare System: A Systematic Review and Meta-Analysis. Medicine (Baltimore). 2016;95:e2622.

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Giannitelli M, Consoli A, Raffin M, Jardri R, Levinson DF, Cohen D, Laurent-Levinson C. An overview of medical risk factors for childhood psychosis: Implications for research and treatment. Schizophr Res (sous presse).

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Jardri R, Bartels-Velthuis AA, Debbané M, Jenner JA, Kelleher I, Dauvilliers Y, Plazzi G, Demeulemeester M, David CN, Rapoport J, Dobbelaere D, Escher S, Fernyhough C. From phenomenology to neurophysiological understanding of hallucinations in children and adolescents. Schizophr Bull 2014;40(Suppl. 4):221-32.

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Vers une médecine personnalisée en psychiatrie de l’enfant et de l’adolescent

Florence Askenazy Mai 2016

Les maladies mentales sévères de l’enfant et de l’adolescent réprésentent un enjeux majeur de santé publique.  Ils forment un large spectre de pathologies allant des troubles envahissants du développement au troubles bi-polaires. Malgré un traitement pharmacologique adapté, certains patients sont pharmaco-résistants et montrent une persistance des symptômes et une inefficacité des traitements psychotropes. Ces enfants et adolescents sont généralement exposés à de nombreuses molécules psychotropes et souvent à une poly-thérapie, augmentant le risque des effets indésirables de ces traitements. De plus, les hospitalisations en pédopsychiatrie, parfois d’une durée prolongée, sont fréquentes pour ces patients, et aggravent le pronostic à court, moyen et long term.

La plupart des traitements psychotropes et notamment les antipsychotiques (AP) et antidepresseurs (AD) sont métabolisés au niveau hépatique par le cytochrome P450 et en particulier par l’enzyme CYP2D6 (e.g. rispéridone, aripiprazole, sertraline, fluoxétine). Le gène CYP2D6 qui encode l’enzyme est très polymorphe, et certains polymorphismes génétiques sont liés soit à une métabolisation trop rapide et à une inefficacité clinique des médicaments (métaboliseur ultra-rapide), soit à une métabolisation trop lente et des nombreux effets indésirables (métaboliseur lent). La mise en évidence d’une anomalie du cytochrome P450 a un impact direct pour la prise en charge du patient et les décisions thérapeutiques du clinicien. Le praticien pédopsychiatre priviligiera alors des thérapies alternatives comme les antipsychotiques non métabolisés par CYP2D6, diminuant ainsi l’échec du traitement et devra intensifier les prises en charges non pharmacologiques.

C’est pour ces raisons que nous avons instauré la recherche d’anomalie pharmaco-génétique dans notre service. En effet, nous avons pu mettre en évidence une duplication CYP2D6 chez plusieurs patients présentants des maladies mentales sévères, des hospitalisations prolongées et une résistance à de nombreux psychotropes de type AP et AD. Nous faisons donc l’hypothèse qu’une anomalie du cytochrome P450 et notamment la duplication du gène CYP2D6 a une prévalence élévée dans cette population.

Des études futures seront necessaire pour évaluer l’intérêt de l’analyse pharmacogénétique dans une population plus grande. C’est d’autant plus important qu’elle n’est actuellement pas remboursé par la sécurité sociale et peut s’effectuer seulement dans quelques laboratoires français, ne permettant pas leur utilisation en pratique courrante. Par ailleurs, des avancés considérables en recherche pharmacogénétique permettront bientôt l’exploration de nombreux gènes du cytochrome P450 mais également des transporteurs des médicaments et des récepteurs, augmentant ainsi leur sensibilité.

En conclusion, une prescription personnalisée en pédopsychiatrie prenant en considération le métabolisme individuel du patient pourrait donc considérablement diminuer les risques des traitements psychotropes, et améliorer le pronostic et la qualité de vie de ces enfants et adolescents.

Susanne Thümmler et Florence Askenazy
Service Universitaire de Psychiatrie de l’Enfant et de l’Adolescent
Hôpitaux Pédiatriques de Nice CHU-Lenval
thummler.s@pediatrie-chulenval-nice.fr
askenazy.f@pediatrie-chulenval-nice.fr
(lien vers site web de pharmacogénétique : http://www.pharmacogenetics.fr/index.html)

Towards personalized medicine in child and adolescent psychiatry

Persico AM, Arango C, Buitelaar JK, Correll CU, Glennon JC, Hoekstra PJ, Moreno C, Vitiello B, Vorstman J, Zuddas A; European Child and Adolescent Clinical  Psychopharmacology Network. Unmet needs in paediatric psychopharmacology: Present scenario and future perspectives. Eur Neuropsychopharmacol. 2015;25:1513-1531.
Table des interactions médicamenteuses, cytochrome P450 et P-glycoproteine. Centre d’information thérapeutique et de pharmacovigilance, Hôpitaux universitaires de Genève.
http://www.hug-e.ch/sites/interhug/files/structures/pharmacologie_et_toxicologie_cliniques/
documents/interactions_medicamenteuses_et_cyp450.pdf.

Van der Weide J et Hinrichs JWJ. The Influence of Cytochrome P450 Pharmacogenetics on Disposition of Common Antidepressant and Antipsychotic Medications. Clin Biochem Rev. 2006; 27: 17–25.

Hicks JK, Swen JJ, Thorn CF, Sangkuhl K, Kharasch ED, Ellingrod VL, Skaar TC, Müller DJ, Gaedigk A, Stingl JC; Clinical Pharmacogenetics Implementation Consortium. Clinical Pharmacogenetics Implementation Consortium guideline for CYP2D6 and CYP2C19 genotypes and dosing of tricyclic antidepressants. Clin Pharmacol Ther. 2013; 93:402-408.

Prows CA, Nick TG, Saldaña SN, Pathak S, Liu C, Zhang K, Daniels ZS, Vinks AA, Glauser TA. Drug-metabolizing enzyme genotypes and aggressive behavior treatment response in hospitalized pediatric psychiatric patients. J Child Adolesc Psychopharmacol. 2009; 19:385-394.


Psychothérapies Psycho-dynamiques pour l’enfant et l’adolescent déprimé

Florence Askenazy Mars 2016

Les journées annuelle 2016 de la Société Française de Psychiatrie de l’Enfant et de l’Adolescent se tiendront à Lyon sur le thème des thérapeutiques du 27 au 29 mai 2016.

En préambule à cette journée nous vous proposons quelques références sur le thème des psychothérapies et des pistes de réflexion.

Sur cette thématique la société se place dans une perspective non dogmatique et ouverte aux avancées scientifiques tout en maintenant et reconnaissant l’importance de la pensée psycho-dynamique et de la relation dans le soin individuel.

 

Le contexte

 

En 2004, en France, paraît à la demande des pouvoirs publics un rapport de l’INSERM concernant les psychothérapies.

Il a été très controversé et Philippe Douste –Blazy alors ministre de la santé, annonce en 2005 le retrait du rapport du site du ministère de la santé (source Wikipédia) https://fr.wikipedia.org/wiki/Évaluation_des_psychothérapies

La finalité de son message semble être la suivante : il est nécessaire de pouvoir justifier de nos pratiques et il faut prendre en compte les contraintes économiques : “l’évaluation peut avoir donc un caractère stimulant pour la recherche et pour la légitimation de l’importance de la méthode psychanalytique dans nos établissements de soin et en cabinet” nous dit JM Thurin, un des experts psychanalystes auteur du rapport, dans son blog spécifiquement dédié à une discussion ouverte sur ce sujet www.techniques-psychotherapiques.org.

En France, la psychothérapie inspirée de la psychanalyse est toujours la pratique la plus répandue, dans les institutions, comme dans les pratiques privées. Cependant, nous n’avons pas de chiffre d’activités connus, en effet les codifications actuelles ne permettent pas d’obtenir des données à partir du RIM-Psy (Recueil et traitement des données d’activité médicale en psychiatrie). En grande Bretagne 44% des services publics dans la communauté proposent des thérapies psycho-dynamiques (Fonagy et al 2005). Elles sont pratiquées par les médecins, les psychologues, les infirmières. En Allemagne : 74 % des psychothérapeutes d’enfants et d’adolescents sont capables de proposer des psychothérapies psycho-dynamiques (Kassenärztliche Bundesvereinigung 2011 www.kbv.de/html/299.php).

 

Les données dans ce domaine

 

A ce jour il n’existe pas de données permettant d’indiquer précisément sur quels critères un adolescent déprimé doit suivre tel type de thérapie. On constate par ailleurs l’absence de données sur l’intérêt de la psychothérapie psycho-dynamique dans la prévention et il n’y a pas d’études de cohorte à long terme.

Pour mener des recherches, la difficulté est liée à la complexité du sujet qui ne permet pas de choisir un critère d’évaluation principal pour obtenir des réponses réplicables. Pour JM Thurin c’est « la découverte des processus de changement et de leurs conditions qui est le nouvel enjeu de la recherche évaluative en psychothérapie ».

La recherche sur les psychothérapies est encore marginale : 100 publications /semaine en psychiatrie biologique et 20 fois moins sur les psychothérapies. Elle intéresse donc peu de chercheurs et son rapport cout /bénéfice escompté en terme de point MERRI pour les hôpitaux est élevé.

Le nombre d’études contrôlées randomisées, le « gold standard de l’évaluation » concernant la psychothérapie psycho-dynamique en population pédiatrique est réduit. Dans la revue de littérature réalisée par les équipes de la Tavistock Clinic de Londres et du centre Anna Freud (Midgley & Kennedy 2011), les auteurs identifient seulement 8 études randomisées, la plupart seulement sur de petits échantillons, de nature pilotes et donc avec peu de pouvoir statistique. Les auteurs citent les études suivantes comme ayant la méthodologie la plus solide : Trowell et al 2007 ; Chanen et al 2008 ; Gilboa-Scechtmann 2010 ;Lock et al 2010.

Actuellement une étude de grande ampleur est en cours en grande Bretagne, son design (muticentrique, randomisé, prospectif sur deux ans) est décrit dans un article de 2011 (Goodyer et al 2011). Il s’agit de l’étude IMPACT dépression: elle a pour but de comparer l’efficacité de la thérapie comportementale par rapport à la psychothérapie psycho-dynamique. Cette étude intègre dans une recherche des critères d’évaluations psycho-dynamiques qualitatifs, mais aussi en neuro-imagerie en biologie et en génétique et donc se pose dans l’optique d’une pédopsychiatrie intégrative. Une inclusion de plus de 500 patients est prévue.

 

Les recommandations pour la psychothérapie dans la dépression de l’enfant et/ou de l’adolescent en France, en Grande Bretagne et aux Etats Unis.

 

En pédopsychiatrie un délai de 20 ans est nécessaire entre la publication des recommandations et leur application en pratique courante quel que soit le pays.

L’ensemble des recommandations propose toujours la psychothérapie en première intention avant tout traitement par psychotropes. Ce dernier étant toujours recommandé indiqué associé avec une psychothérapie. Par contre, la psychothérapie psycho-dynamique n’est jamais recommandée en première intention. La grande différence entre les recommandations anglo-saxonnes et Française, est que le traitement antidépresseur est recommandé dès une intensité moyenne en Grande Bretagne et aux US, en France c’est uniquement en cas d’épisode dépressif majeur. Les recommandations les plus ouvertes et insistant sur la nécessité de maintenir la diversité des pratiques et le jugement du clinicien sont les recommandations françaises.

Les recommandations Britanniques : NICE (National Institute for Health and Clinical Excellence 2005) procèdent par étape elles indiquent l’arbre décisionnel suivant : psychoéducation en première intention, puis la thérapie cognitivo comportementale , puis la thérapie psycho-dynamique et enfin le traitement antidépresseur. Elles soulignent que la meilleure preuve reste le jugement du clinicien et la prise en compte des préférences de l’usager.

Les recommandations Françaises sont parues en novembre HAS (Nov 2014). Elles sont bien moins directives que les NICE.

Les recommandations de l’AACAP (American Academy for Child and Adolescent Psychiatry) (2007) (disponibles en ligne sur le site de l’AACAP), sont beaucoup plus directives que les précédentes et font preuves d’une recherche de contrôle sur les pratiques. Pour l’ AACAP l’évaluation est indissociable du traitement et doit se faire en routine. L’indication est ensuite déterminée par un algorithme. Le screening systématique qui vise à définir des cibles thérapeutiques est au centre des préoccupations, portant le regard non sur l’ensemble de l’individu et de sa souffrance, mais posant la question ainsi :  qu’est-ce qui cause le plus de souffrance dans ce cas ? Des indications découlent un arbre décisionnel et des actions. Par exemple, en cas de problème aigue : la thérapie brève est conseillée, en cas de problème chronique c’est la thérapie à long terme. Il est important de souligner que les auteurs pointent qu’il s’agit d’un idéal auquel seuls quelques centres universitaires se conforment.

L’AACAP en 2012 propose des recommandations plus larges pour la pratique de la psychothérapie de l’enfant. Elles sont centrées sur des préoccupations adaptatives : diminuer les inhibitions; développer une pensée flexible. C’est l’assouplissement des défenses qui est recherché. Le point central des préoccupations est la recherche pour le patient d’une mise en balance des capacités d’élaboration face au comportement, avec la nécessité d’une efficacité thérapeutique sur les comportements agis du sujet. A nouveau, nous retrouvons, des indications avec un arbre décisionnel et des actions ; des buts thérapeutiques évaluables explicites. Pour les problèmes aigues les cibles authentifiées sont : l’amélioration symptomatique; l’adaptation sociale : en famille, à l’école, avec les pairs. A long terme : 3 lignes directrices se dégagent : (1) réadaptation de la personnalité, développement de l’imaginaire contre comportement impulsif (2) par l’assouplissement des défenses (3) pour améliorer l’autonomie sociale (scolaire et sexuelle) et l’estime de soi.

 

Les difficultés du Praticien

 

En pratique, nous sommes confrontés à de nombreux écueils. L’absence de données solides permettant de nous appuyer sur des indications fiables pour orienter les patients, risque de confronter le praticien à des décisions « arbitraires » dans son choix de traitement et qui seront infléchies par sa culture, sa formation personnelle. Une autre grande difficulté est l’absence de données sur l’intérêt de la psychothérapie psycho-dynamique dans la prévention et dans la prévention des rechutes, et il n’y a pas d’études de cohorte à long terme.

Il semble donc aujourd’hui important de pouvoir développer la recherche dans ce domaine en France pour préserver notre regard sur notre métier. En effet, les modalités méthodologiques des études de recherche sur la thématique des psychothérapies orientent les résultats et les conclusions qui conduisent vers des recommandations. Elles doivent, l’expérience nous l’a montré, savoir rester suffisamment souples pour ne pas être attaquées et/ou instrumentalisées.

Cependant nous souffrons des conflits entre des paradigmes rivaux qui révèlent des luttes pour la survie des communautés scientifiques qui les promeuvent. Ceci est un frein considérable aux avancées.

La pédopsychiatrie Française se retrouve donc face à d’importants challenges : intégrer les données de l’évaluation et des découvertes en neurosciences ; participer à l’essor de la recherche clinique pour les générations futures ; maintenir une pensée vivante libre dans un cadre conceptuel solide ; dans l’institution créer les conditions d’un cadre qui autorise une créativité permanente.

 

Pour conclure

 

Je vous propose des pistes de réflexions ouvertes pour tenter d’améliorer les réponses pratiques sur le terrain : favoriser les conditions d’un dialogue multidisciplinaire ; tenter de lever les guerre de conflit d’intérêt, les tabous, les croyances ; respecter un temps long pour un changement progressif des représentations ; maintenir la diversité des pratiques ; préserver une pédopsychiatrie ouverte et capable d’apporter une réponse singulière au plus grand nombre ; et enfin soutenir les processus de changement.

 

Ce document donne des références actuelles dans ce domaine, mais n’est pas exhaustif.

Florence Askenazy
CHU-Lenval Nice
EA Cobteck
askenazy.f@pediatrie-chulenval-nice.fr

 

Bibliographie

AACAP Practice Parameter for the Assessment and Treatment of Children and Adolescents with Depressive Disorders JAACAP 2007 46:11 1503-1526

AACAP Practice Parameter for Psychotherapy with Children JAACAP 2012 51:5 541-557

Chanen, a.m., Jackson, h.j., McCutcheon, l.k., Joyey, m., Dudgeon, p., Yuen, h.p., Germano, d., Nistico, h.,McDougall, e.,Weinstein, c., Clarkson, v., and McGorry, p.d. (2008) ‘Early intervention for adolescents with borderline personality disorder using cognitive analytic therapy: randomised controlled trial’. British Journal of Psychiatry, 193 (6): 477–84.

Fonagy P1, Roth A, Higgitt A Psychodynamic psychotherapies: evidence-based practice and clinical wisdom. Bull Menninger Clin. 2005 Winter;69(1):1-58.

Gilboa-schechtman, e., Foa, e.b., Shafran, n., Aderka, i.m., Powers, m.b., rachamin, l., Rosenbach, l., Yadin, e. Apter, a. (2010) Prolonged exposure versus dynamic therapy for adolescent PTSD: a pilot randomized controlled trial. Journal of the American Academy of Child and Adolescent Psychiatry, 49 (10): 980–9.

Goodyer, i., Tasncheva, s., Byford, s., Dubicka, b., Hill, j., Raphael, k., Reynolds, s., Roberts, c., Senior, r., Suckling, j., Wilkinson, p., Target, m. Fonagy, p. (2011) Improving Mood with Psychoanalytic and Cognitive Therapies (IMPACT): a pragmatic effectiveness superiority trial to investigate whether specialized psychological treatment reduces the risk for relapse in adolescents with moderate to severeunipolar depression. Trials, 12: 175.

Lock, j., Le grange, d., Agras, w.s., Moye, a., Bryson, s.w. and Jo, b. (2010) Randomized clinical trial comparing family-based treatment with adolescent-focused individual therapy for adolescents with anorexia nervosa’. Archives of General Psychiatry, 67 (10): 1025–32.

N Midgley, E Kennedy Psychodynamic psychotherapy for children and adolescents: a critical review of the evidence base Journal of Child Psychotherapy, 201137-3:232-260

National Institute for Health and Clinical Excellence; 2005 Depression in children and young people : identification and management in primary and secondary care. London: Trowell, j., Joffe, i., Campbell, j., Clemente, c., Almgvist, f., Soininen, m., Koskenranta-aslto, u., Weintraub, s., Kolaitis, g. and Tomarar, v. (2007)

Childhood depression: a place for psychotherapy. An outcome study comparing individual psychodynamic psychotherapy and family therapy. European Child and Adolescent Psychiatry, 16 (3): 157–67.

P. Fonagy, D. Cottrell, J. Phillips, D. Bevington, D. Glaser & E. Allison New York. What works for whom? A critical review of treatments for children and adolescents. Guilford Press, 2015. pp. 640

 


Qu’est ce que le genre?

Colette Chiland  Janvier 2016

Résumé :

Gender est un mot importé en anglais du français gendre au xive siècle ; il a alors un sens principal grammatical : classe de noms qui régit désaccords, masculin, féminin, neutre. Gender a aussi un sens mineur tombé dans l’oubli : l’état de mâle ou de femelle. En 1955, John Money donne une vie nouvelle à ce deuxième sens en parlant de gender comme du statut social en fonction du sexe, affiché dans le rôle, ressenti dans l’identité.Genre en franc¸ais avait le même sens grammatical que gender, mais en outre une importante polysémie ; il va s’enrichir du sens identitaire/statutaire en accord ou non avec le sexe biologique natal. Ce terme est approprié pour rendre compte de la dissociation qui peut se produire chez les intersexes entre réalité biologique du sexe et statut social. Le terme genre connaît une inflation et perd le sens originel donné par Money pour en arriver à désigner une réalité psychédélique qui l’emporte sur la réalité biologique. Il est étrange que personne ne cite le texte originel de Money. Peut-être parce que Money sent le soufre. . . Les transsexuels, les transgenres, les néo-féministes qui se déclarent queer, lesbiennes et non pas femmes formulent des demandes diverses. On ne peut pas changer le sexe biologique d’une personne humaine, mais on peut inventer des statuts ad hoc pour diminuer les souffrances. Parler un langage clair peut aider à raison garder et à parvenir à un consensus grâce à un dialogue constructif plus tolérant de part et d’autre.

Disponible en ligne sur ScienceDirect www.sciencedirect.com 


 

Quand la pratique clinique de la « vraie vie » rencontre les contraintes économique et la recherche clinique dans l’intérêt du patient : l’exemple des soins de l’anorexie mentale.

 

Florence Askenazy*-Priscille Girardin**-Nathalie Godart***   Mai 2014  

* Service Universitaire de Psychiatrie de l’enfant et de l’adolescent. CHU-Lenval- Laboratoire Cobteck EA 7276 – Université de Nice Sophia Antipolis.

**Responsable Fédération Hospitalo Universitaire et GCS de psychiatrie enfant ado CHU-CHRouvray, chef de pole de psychiatrie enfant-ado du CHRouvray, Laboratoire Psy-NCA-EA-4700, Université de Rouen.

*** Service de psychiatrie de l’adolescent et l’adulte jeune
IMM 42 Bd Jourdan 75014; U669 INSERM, Universités Paris Descartes et Paris
SUD.
Le coût de prise en charge de l’anorexie mentale est supérieur à celui de la schizophrénie (Striegel Moore et al).Les soins pour anorexie mentale sont essentiellement ambulatoires en première intention ; comme le recommande l’HAS (juin 2010) l’hospitalisation n’est rendue nécessaire que par une urgence somatique ou psychique, un échec des soins ambulatoires ou leur impossibilité. Idéalement une graduation des soins entre ambulatoire, hôpital de jour et hospalisation temps plein est préconisée, mais sans que des études aient évalué les critères de meilleure indication et de meilleure efficacité de ces modalités, à de rare exceptions près. http://www.has-sante.fr/portail/jcms/c_985715/fr/anorexie-mentale-prise-en-charge.
Cependant les hospitalisations consécutives à l’anorexie mentale sont relativement longues (trois à quatre mois en moyenne, jusqu’à un an pour les formes les plus graves), répétitives et contribuent largement aux coûts des soins. Ces derniers sont plus souvent entièrement supportés par la Sécurité sociale par le biais d’une prise en charge en ALD exonérante via des affections de longue durée.
Dans le contexte médico-économique actuel la question de l’efficacité de soins couteux tels que l’hospitalisation temps plein dans le traitement de l’anorexie mentale, et particulièrement à l’adolescence, est au centre des préoccupations des tutelles de santé, mai bien entendu aussi de celles des cliniciens.
Cette question est un sujet d’actualité brûlant dans tous les pays. En témoigne, le fait que l’évaluation comparative de l’efficacité de différentes modalités de soins dans l’anorexie mentale , dans un contexte qui est celui de la « vraie vie », avec des questions centrées sur la pratique clinique, se développe rapidement ces dernières années dans la littérature internationale, (principalement en Europe et en Australie), soit en incluant comme groupe contrôle une prise en charge habituelle (qui ne s’en sort pas toujours perdante) pour tenter de faire mieux, soit en comparant deux modalités existantes (par exemple : Hughes et al, 2014 ;Lose A et al, 2014 ; Waterman-Collins et al, 2014 ; Herpertz-Dahlmann et al 2014 ; Zipfel et al, 2014 ; Schmidt et al, 2013 ;Simon et al2013 ; Touyz et al 2013 ; Godart et al,2012 ). Ces questions d’importance sont publiées dans les meilleures revues de notre discipline
L’article choisi ici, illustre parfaitement ce contexte et se centre sur la question importante de la comparaison d’une modalité de soin en hospitalisation de jour à une modalité en hospitalisation temps plein. Il est paru dans le prestigieuse revue « The Lancet ».
Nous en présentons une synthèse ainsi que la traduction française du résumé.
Il regroupe un consortium de six équipes germaniques ainsi qu’une chercheuse de l’Institut de Psychiatrie au Kings College, responsable de la section des troubles des conduites alimentaires au Maudsley hospital à Londres, d’origine Allemande, (Ulrike Schmidt), auteure de nombreux articles.
L’auteure principale : Beate Herpertz-Dahlmann est professeuse de psychiatrie de l’enfant et de l’adolescent à Aachen en Allemagne et dirige un service pour enfants et adolescents comprenant des unités de jours et de temps plein.
http://www.ukaachen.de/kliniken-institute/klinik-fuer-psychiatrie-psychosomatik-und-psychotherapie-des-kindes-und-jugendalters/klinik.html

L’étude présentée est académique, multicentrique, randomisée, financée par l’état Allemand.
La population d’étude est composée uniquement de filles âgées de 11 à 18 ans (en moyenne 15 ans) nécessitant une première hospitalisation pour un diagnostic d’anorexie mentale, ayant un IMC< 10ieme percentile (en moyenne 15) habitant à moins de 60 minutes de transport du centre et ne présentant ni trouble de la personnalité ni trouble psychotique, ni abus d’alcool ou d’autres substances, ni comportement d’automutilation, ayant un QI >85. Cette population est représentative des situations les moins sévères nécessitant une hospitalisation, ce qui est cliniquement logique pour une prise en charge en hôpital de jour.
Le design propose que tous les patients répondant aux critères d’inclusion, admis pour une hospitalisation temps plein soient « screenés » puis inclus. Au début de la troisième semaine d’hospitalisation temps plein les patients sont randomisés en deux groupes : ceux qui poursuivent l’hospitalisation temps plein, ceux qui poursuivent une hospitalisation de jour.
Le suivi d’étude est de 12 mois, les évaluations sont réalisées, à l’admission, à 12 mois, à la sortie de l’hôpital et lors d’une éventuelle ré-hospitalisation.
La méthodologie statistique utilisée, dite essais de non infériorité permet de montrer la non infériorité d’un nouveau traitement par rapport à un autre.
Dans cet essai le critère d’évaluation principal pour comparer l’efficacité de l’hôpital de jour par rapport à l’hôpital temps plein est l’évolution de l’indice de masse corporelle.
Il est à noter que ce choix est discutable car la marge de non infériorité est difficile à évaluer. Ici elle a été définie comme assez faible à 0.75kg/m2.
Les résultats principaux sur une cohorte de 176 patients randomisés dans les deux groupes montrent en analyse d’intention de traiter modifiée l’absence d’infériorité de l’hospitalisation de jour par rapport à l’hospitalisation temps plein, ainsi qu’un nombre d’effets secondaires similaires dans les deux groupes, les plus sévères toujours reliés à des idées suicidaires, dont à noter sur 87 patients une tentative de suicide dans le groupe de patients traités en hôpital de jour.
Les résultats suivant qui sont éclairants pour la pratique quotidienne : sur les 85 patients inclus dans le groupe temps plein, 20 n’ont pas terminé l’étude , 10 sont sortis d’études et 10 ont interrompu les soins contre avis médical. Dans le groupe hôpital de jour sur 87 patients inclus, 19 n’ont pas terminé l’étude dont 16 pour ré-hospitalisation temps plein, 7 sont sortis contre avis médical dont quatre après avoir basculé vers une hospitalisation temps plein.
Selon les auteurs les résultats sont pertinents sur le plan international en raison d’un échantillon d’adolescent anorexique typique, suivant un programme de soins intensif de type comportementaliste.
Ils soulignent ensuite l’intérêt de l’hôpital de jour par rapport à l’hospitalisation conventionnelle pour les patients eux mêmes, et enfin un coût pour les caisses d’assurance maladie inférieur de 20% pour ces patients.
Donc en résumé, que nous apporte cet article ? Que le traitement en hospitalisation de jour de l’anorexie mentale non chronique de l’adolescent a une efficacité non inférieure à l’hospitalisation pour une première hospitalisation et à moindre cout comparé à l’hospitalisation temps plein.

On peut supposer d’autres limites à l’hospitalisation temps plein et intérêts potentiels à l’hôpital de jour. Au delà du coût économique, on peut s’interroger sur le coût « social » d’une déscolarisation et d’une mise à distance du milieu habituel, dans une pathologie où le risque d’isolement social est un point important sur le plan du devenir. De plus, même si on peut défendre l’intérêt d’une prise de distance avec le milieu habituel, l’évolution sociétale nous conduit de plus en plus à travailler avec et au sein des familles. Les familles sont de plus en plus mobilisées et souhaitent être actrices, parce que leurs difficultés à se séparer sont de plus en plus marquées dans une société plus individualiste et repliée sur la cellule familiale.
Bien que les programmes de soins développés outre Rhin ne soient pas complétement superposables aux approches en France, ce résultat est à prendre en considération et soutien le développement d’hôpitaux de jour spécialisés dans les TCA dans notre pays, ces structures faisant actuellement cruellement défaut au détriment des patients. Ainsi, l’AFDAS- TCA http://www.anorexieboulimie-afdas.fr soutien la création d’hôpitaux de jour sur tout le territoire, et appuiera les dossiers qui seront soumis à la Fondation Hôpitaux de Paris-Hôpitaux de France. Et, en 2014, on pourrait se laisser aller à rêver qu’un tel programme de développement national de ces structures soit associé à une recherche évaluative de l’ampleur de celles développées en Allemagne, en direction des adultes comme des adolescents, évaluant l’intérêt de ces structures à différents moments de la prise en charge…dans l’objectif d’améliorer la qualité et l’efficacité de nos soin.
Bibiographie

1: Striegel-Moore RH, Leslie D, Petrill SA, Garvin V, Rosenheck RA. One-year use and cost of inpatient and outpatient services among female and male patients with an eating disorder: evidence from a national database of health insurance claims. Int J Eat Disord. 2000 May;27(4):381-9.
2: Hughes EK, Le Grange D, Court A, Yeo MS, Campbell S, Allan E, Crosby RD, Loeb KL, Sawyer SM. Parent-focused treatment for adolescent anorexia nervosa: a study protocol of a randomised controlled trial. BMC Psychiatry. 2014 Apr 8;14:105. doi: 10.1186/1471-244X-14-105. PubMed PMID: 24712855; PubMed Central PMCID: PMC3991924.
3: Lose A, Davies C, Renwick B, Kenyon M, Treasure J, Schmidt U; MOSAIC trial group. Process evaluation of the maudsley model for treatment of adults with anorexia nervosa trial. Part II: Patient experiences of two psychological
therapies for treatment of anorexia nervosa. Eur Eat Disord Rev. 2014 Mar;22(2):131-9. doi: 10.1002/erv.2279. Epub 2014 Jan 24. PubMed PMID: 24590563.
4: Waterman-Collins D, Renwick B, Lose A, Kenyon M, Serpell L, Richards L, Boughton N, Treasure J, Schmidt U; MOSAIC trial group. Process evaluation of the MOSAIC Trial, Part I: Therapist experiences of delivering two psychological
therapies for treatment of anorexia nervosa. Eur Eat Disord Rev. 2014 Mar;22(2):122-30. doi: 10.1002/erv.2278. Epub 2014 Jan 21. PubMed PMID: 24446244.
5: Herpertz-Dahlmann B, Schwarte R, Krei M, Egberts K, Warnke A, Wewetzer C, Pfeiffer E, Fleischhaker C, Scherag A, Holtkamp K, Hagenah U, Bühren K, Konrad K, Schmidt U, Schade-Brittinger C, Timmesfeld N, Dempfle A. Day-patient treatment after short inpatient care versus continued inpatient treatment in adolescents with anorexia nervosa (ANDI): a multicentre, randomised, open-label, non-inferiority trial. Lancet. 2014 Apr 5;383(9924):1222-9. doi: 10.1016/S0140-6736(13)62411-3. Epub 2014 Jan 17. PubMed PMID: 24439238.
6: Le Grange D, Accurso EC, Lock J, Agras S, Bryson SW. Early weight gain predicts outcome in two treatments for adolescent anorexia nervosa. Int J Eat Disord. 2014 Mar;47(2):124-9. doi: 10.1002/eat.22221. Epub 2013 Nov 4. PubMed PMID: 24190844.
7: Zipfel S, Wild B, Groß G, Friederich HC, Teufel M, Schellberg D, Giel KE, de Zwaan M, Dinkel A, Herpertz S, Burgmer M, Löwe B, Tagay S, von Wietersheim J, Zeeck A, Schade-Brittinger C, Schauenburg H, Herzog W; ANTOP study group. Focal psychodynamic therapy, cognitive behaviour therapy, and optimised treatment as usual in outpatients with anorexia nervosa (ANTOP study): randomised controlled trial. Lancet. 2014 Jan 11;383(9912):127-37. doi: 10.1016/S0140-6736(13)61746-8. Epub 2013 Oct 14. PubMed PMID: 24131861.
8: Schmidt U, Renwick B, Lose A, Kenyon M, Dejong H, Broadbent H, Loomes R, Watson C, Ghelani S, Serpell L, Richards L, Johnson-Sabine E, Boughton N, Whitehead L, Beecham J, Treasure J, Landau S. The MOSAIC study – comparison of
the Maudsley Model of Treatment for Adults with Anorexia Nervosa (MANTRA) with Specialist Supportive Clinical Management (SSCM) in outpatients with anorexia nervosa or eating disorder not otherwise specified, anorexia nervosa type: study protocol for a randomized controlled trial. Trials. 2013 May 30;14:160. doi: 10.1186/1745-6215-14-160. PubMed PMID: 23721562; PubMed Central PMCID: PMC3679869.
9: Simon W, Lambert MJ, Busath G, Vazquez A, Berkeljon A, Hyer K, Granley M, Berrett M. Effects of providing patient progress feedback and clinical support tools to psychotherapists in an inpatient eating disorders treatment program: a
randomized controlled study. Psychother Res. 2013;23(3):287-300. doi: 10.1080/10503307.2013.787497. Epub 2013 May 8. PubMed PMID: 23656489.
10: Touyz S, Le Grange D, Lacey H, Hay P, Smith R, Maguire S, Bamford B, Pike KM, Crosby RD. Treating severe and enduring anorexia nervosa: a randomized controlled trial. Psychol Med. 2013 Dec;43(12):2501-11. doi: 10.1017/S0033291713000949. Epub 2013 May 3. Erratum in: Psychol Med. 2013 Dec;43(12):2512. PubMed PMID: 23642330.
11: Schmidt U, Oldershaw A, Jichi F, Sternheim L, Startup H, McIntosh V, Jordan J, Tchanturia K, Wolff G, Rooney M, Landau S, Treasure J. Out-patient psychological therapies for adults with anorexia nervosa: randomised controlled
trial. Br J Psychiatry. 2012 Nov;201(5):392-9. doi: 10.1192/bjp.bp.112.112078. Epub 2012 Sep 20. PubMed PMID: 22995632.
12: Godart N, Berthoz S, Curt F, Perdereau F, Rein Z, Wallier J, Horreard AS, Kaganski I, Lucet R, Atger F, Corcos M, Fermanian J, Falissard B, Flament M, Eisler I, Jeammet P. A randomized controlled trial of adjunctive family therapy
and treatment as usual following inpatient treatment for anorexia nervosa adolescents. PLoS One. 2012;7(1):e28249. doi: 10.1371/journal.pone.0028249. Epub 2012 Jan 4. PubMed PMID: 22238574; PubMed Central PMCID: PMC3251571.

Voici une traduction en Français de l’abstract, l’article n’est pas accessible librement en ligne.

Background : L’hospitalisation temps plein est le traitement de choix pour les adolescents souffrant d’anorexie modérée à sévère, il reste couteux et les risques de rechutes et ré-hospitalisations sont importants. L’hôpital de jour est moins cher et peut éviter des problèmes de rechute et de réadmission en facilitant la transition de l’hôpital au domicile. Nous avons étudié l’innocuité et l’efficacité de l’hôpital de jour après une courte hospitalisation par rapport à la poursuite de l’hospitalisation temps plein.
Méthodes :
Il s’agit d’un essai multicentrique, randomisé, en ouvert, dit de non-infériorité . On été inclus des patients de sexe féminin (âgés de 11-18 ans) souffrant d’anorexie mentale dans six centres en Allemagne . Les patients étaient éligibles s’ils avaient un indice de masse corporelle (IMC) inférieur au dixième percentile et si c’était leur première admission pour anorexie mentale. Nous avons utilisé une séquence de randomisation générée par ordinateur qui attribue au hasard les patients en temps plein ou en hôpital de jour après 3 semaines d’hospitalisation temps plein (stratifiés pour l’âge et l’IMC à l’admission). Le programme de traitement et l’intensité du traitement dans les deux groupes d’étude étaient identiques. Le résultat principal a été l’augmentation de l’IMC entre le moment de l’admission et à 12 mois de suivi ajusté pour l’âge et la durée de la maladie (marge de non infériorité de 0,75 kg / m2). L’analyse a été faite en intention de traiter modifiée. Cet essai est inscrit au registre international des essais cliniques sous le numéro : ISRCTN67783402 , et au Deutsches Klinischer Studien sous le numéro : DRKS00000101 .
Résultats :
Entre le 2 février 2007, à 27 Avril 2010, nous avons screenés 660 patients éligibles et pour 172 nous avons attribué au hasard à un traitement : 85 en hospitalisation temps plein et 87 en hôpital de jour. L’efficacité de l’hôpital de jour n’était pas inférieure à celle de l’hospitalisation temps plein par rapport au critère d’évaluation principal : l’ IMC à 12 mois de suivi (différence moyenne 0,46 kg / m2 en faveur de l’hôpital de jour (Intervalle de confiance à 95% , -0 · 11 à 1 · 02 ; pnon -infériorité <0,0001 ). Le nombre d’événements indésirables graves liés au traitement était similaire dans les deux groupes d’étude (huit dans le groupe temps plein , sept dans le groupe de jour ). Trois événements indésirables graves dans le groupe temps plein et deux dans le groupe temps plein étaient liées à des idées suicidaires ; un patient dans le groupe hôpital de jour a tenté de se suicider trois mois après sa sortie.
Interprétation :
L’hospitalisation de jour après une courte hospitalisation temps plein dans l’anorexie mentale de l’adolescent non chronique ne semble pas moins efficace que l’hospitalisation temps plein pour la restauration et l’entretien du poids au cours de la première année après l’admission. Ainsi, le traitement en hospitalisation de jour pourrait être une alternative sûre et moins onéreuse à l’hospitalisation temps plein. Nos résultats justifient la large mise en œuvre de cette approche.


Autisme, Troubles envahissants du développement TED, spectre du trouble autistique TSA, actualités et nouvelles pistes.

 Pr Florence Askenazy 05/06/13

Deux événements ont marqué ce mois de mai en ce qui concerne les TED l’annonce du 3ème plan autisme en France et du DSM 5 lors du congrès de l’APA à San Francisco du 18 au 22 mai, alors que le congres de l ‘IMFAR venait de se dérouler du 2 au 4 mai a San Sébastian. Le prochain de déroulera à Atlanta en 2014.

La connaissance pour la compréhension étiopathogénique de l’autisme se poursuit. C’est un spectacle affligeant de contempler l’instrumentalisation dont les découvertes scientifiques font les frais.
En ce qui concerne les classifications il faut être bien conscient de l’importance de leur impact en terme de recherche et donc de retombées sur notre pratique de terrain à plus ou moins long terme.

Le nouveau DSM fera force de loi dans ce domaine jusqu’ à l’horizon 2020.

Cette veille  n’a pas pour objet une critique idéologique ou théorique, son but est d’offrir des informations contemporaines et des pistes de travail.

Le DSM 5 est très controversé au sein même du NIMH. Une pétition circule au sein de l’APA (American Psychaitric Association) contre les dérives de cette nouvelle classification. On peut dire que le seul consensus sur lequel chacun s’est retrouvé est la modification du chiffre romain traditionnel en chiffre arabe!!!

Cependant, le DSM 5 propose des modifications importantes en terme de TED.

Trois entités nosographiques en sont retirées : le syndrome d’ Asperger,  le syndrome de Rett,  le syndrome désintégratif de l’ enfant ainsi que les troubles autistiques non spécifiés.

Il propose une approche plus dimensionnelle et moins catégorielle et apparaît la notion de spectre des troubles autistiques ASD ( Autism Spectrum Disorders)

Ceci a pour but de généraliser l’utilisation des échelles d’évaluation standardisées qui sont dimensionnelles.

D’ autre part il est proposé de conserver deux caractéristiques sémiologiques : Difficultés dans la communication et les interactions sociales, comportements et intérêt limites et répétitifs. Ces deux traits sont accompagnés d’une échelle de sévérité.

Les arguments principaux en sa faveur sont :

1-  L’intérêt d’une conceptualisation plus évolutive qui comprend la  pathologie dans un continuum d’intensité

2- La prise en compte nécessaire et indispensable de la nature dynamique du développement et de l’impact environnemental

3-Il facilite la formation de cohorte de recherche

Les principaux arguments contre sont :

En recherche : il est adapté à la formation de grandes cohortes multicentriques, mais  l’ effacement des différences risque de grever la recherche sur petits effectifs et donc de défavoriser les plus petits pays moins bien organisés pour la mise en place d’études multicentriques. La notion de spectre risque, de plus, de conduire à la formation de populations particulièrement hétérogènes. Enfin la recherche dans des sous groupes phénotypiques pointus souvent porteur de nouvelles découvertes sera plus difficile à mettre en place.

En pratique, cette nouvelle classification soulève d’importantes difficultés. Difficulté pour poser des diagnostics conformes sans utiliser les questionnaires standardisés. Ceci pose aussi la question de l’accès pour les praticiens à ces pratiques et de leur formation.
Ce choix est lourd de conséquences avec un risque d’uniformisation des pratiques sans tenir compte des différences.
L’avenir nous dira si la critique principale qui est celle d’un risque de sur-cotation et sur diagnostic de TSA est fondée.
Un article récent dans la revue en open access en ligne Plos Biology de l’équipe de Baron Cohen à Cambridge donne une lecture intelligente de la future classification DSM 5. Il est accessible en ligne : http://www.plosbiology.org/article/info.

Les pistes actuelles sont nombreuses et variées. Dans cette veille quelques unes sont proposées.

I/ Génétique et recherche translationnelle.

Les recherches translationnelles en cytogénétique comme celles des liens avec les variants liés à l’X  ou eIF4E qui semblent associés au TSA. L’idée qui sous tend ces recherches est celle  d’une action thérapeutique sur la régulation de la synthèse des protéines contrôlant le développement cérébral.

La génétique moléculaire offre aussi un développement majeur, avec une augmentation  du niveau de fiabilité des variations de novo et des loci associés aux TSA.

Il semblerait que les neurologines 1 et 3 liées a l’X impliquées dans la formation des synapses,  ainsi que le gène shanck 3 du Chr 22 soit fortement liées au retard mental associé à l’autisme.

Mol Autism. 2012 Sep 28;3(1):8.

Identification of rare X-linked neuroligin variants by massively parallel sequencing in males with autism spectrum disorder.

Steinberg KM, Ramachandran D, Patel VC, Shetty AC, Cutler DJ, Zwick ME.

Department of Human Genetics, Emory University School of Medicine, Whitehead Biomedical Research Building, Suite 301, Atlanta, 30322, GA, USA. mzwick@emory.edu.

Abstract

BACKGROUND:

Autism spectrum disorder (ASD) is highly heritable, but the genetic risk factors for it remain largely unknown. Although structural variants with large effect sizes may explain up to 15% ASD, genome-wide association studies have failed to uncover common single nucleotide variants with large effects on phenotype. The focus within ASD genetics is now shifting to the examination of rare sequence variants of modest effect, which is most often achieved via exome selection and sequencing. This strategy has indeed identified some rare candidate variants; however, the approach does not capture the full spectrum of genetic variation that might contribute to the phenotype.

METHODS:

We surveyed two loci with known rare variants that contribute to ASD, the X-linked neuroligin genes by performing massively parallel Illumina sequencing of the coding and noncoding regions from these genes in males from families with multiplex autism. We annotated all variant sites and functionally tested a subset to identify other rare mutations contributing to ASD susceptibility.

RESULTS:

We found seven rare variants at evolutionary conserved sites in our study population. Functional analyses of the three 3′ UTR variants did not show statistically significant effects on the expression of NLGN3 and NLGN4X. In addition, we identified two NLGN3 intronic variants located within conserved transcription factor binding sites that could potentially affect gene regulation.

CONCLUSIONS:

These data demonstrate the power of massively parallel, targeted sequencing studies of affected individuals for identifying rare, potentially disease-contributing variation. However, they also point out the challenges and limitations of current methods of direct functional testing of rare variants and the difficulties of identifying alleles with modest effects.

Traduction française :

Identification de rares variants neuroligin lié à l’X par séquençage massif parallèle chez les hommes souffrants de  TSA.

Résumé:

Contexte: les troubles du spectre autistique (TSA) sont fortement héréditaires, mais les facteurs de risque génétiques restent en grande partie inconnus. Bien que les variantes structurelles avec de grands effets de tailles puissent expliquer jusqu’à 15% de TSA,  les études “génome wide” n’ont pas réussi à découvrir des variants nucléotidiques simples communs avec d’importants effets sur le phénotype. Maintenant la tendance dans l’étude des TSA est de passer à l’examen des variantes de séquences rares d’effet modeste, ce qui est plus souvent réalisé par sélection d’exome et le séquençage. Cette stratégie a en effet identifié un certain candidat rare de variants, mais la démarche ne saisit pas toute la gamme des variations génétiques qui pourraient contribuer à un phénotype.

Méthodes: Nous avons interrogé deux loci avec des variants rares connus qui contribuent au TSA, les gènes neuroligin liés à l’X en effectuant le séquençage d’Illumina massivement parallèle des régions de codage et non codante de ces gènes chez les hommes issus de familles atteintes d’autisme multiples. Nous annoté tous les sites de variantes et fonctionnellement testé un sous-ensemble d’identifier d’autres mutations rares contribuant au risque de TSA.

Résultats: Nous avons trouvé sept variants rares dans notre population d’étude. Les analyses fonctionnellesdes trois 3 ‘UTR variants n’ont pas montré d’effets statistiquement significatifs sur l’expression de NLGN3 et NLGN4X. En outre, nous avons identifié deux variantes NLGN3 introns situés dans des sites de liaison de facteurs de transcription conservée quipourraient avoir une incidence sur la régulation des gènes.

Conclusions: Ces données démontrent la puissance des  études de séquençage ciblées sur des individus pour identifier des variants rares potentiellement pathogènes Toutefois, ils soulignent également les défis et les limites des méthodes actuelles de tests fonctionnels directs de variants rares et les difficultés de l’identification des allèles avec des effets modestes

Il semblerait qu’un début d’ossature d’une cartographie génétique des gènes impliqués dans les TSA commence à avancer notamment grâce aux nouvelles technologies comme celle du séquençage à haut débit.

Il existe un consortium aux USA regroupant plus de 60 sites (Autism Sequencing Consortium ) sous l’égide de scientifique du Mont Sinai Hospital à NY. Une échelle qui ne sera jamais possible en France et peine a pouvoir se mettre en place en Europe. On pointe ici aussi les moyens qui sont mis en jeu aux USA pour la recherche en génétique dans l’autisme.

Voici résumé quelques un des points forts de leurs recherches :

•     le «degré stupéfiant » de l’hétérogénéité génétique dans l’autisme, ce qui signifie que de nombreuses personnes atteintes d’autisme ne partagent pas les mutations génétiques similaires;

•     l’identification d’un nombre croissant de gènes spécifiques et des intervalles chromosomiques conférant un risque de TSA;

•     l’importance du rôle émergent dans l’autisme à la fois de rare et  de «de novo mutations germinales», ou mutations développées dans le sperme ou les ovaires des parents et transmises aux enfants et l’existence de loci de gènes associés à l’autisme qui se chevauchent avec d’autres loci associés à d’autres maladies comme la déficience intellectuelle et l’épilepsie.

Neuron. 2012 Dec 20;76(6):1052-6.

The autism sequencing consortium: large-scale, high-throughput sequencing in autism spectrum disorders.

Buxbaum JD, Daly MJ, Devlin B, Lehner T, Roeder K, State MW; Autism Sequencing Consortium.

Collaborators (65)

Seaver Autism Center, Departments of Psychiatry, Neuroscience, and Genetics and Genomic Sciences, and the Friedman Brain Institute, Mount Sinai School of Medicine, New York, NY 10029, USA. joseph.buxbaum@mssm.edu

Abstract

Research during the past decade has seen significant progress in the understanding of the genetic architecture of autism spectrum disorders (ASDs), with gene discovery accelerating as the characterization of genomic variation has become increasingly comprehensive. At the same time, this research has highlighted ongoing challenges. Here we address the enormous impact of high-throughput sequencing (HTS) on ASD gene discovery, outline a consensus view for leveraging this technology, and describe a large multisite collaboration developed to accomplish these goals. Similar approaches could prove effective for severe neurodevelopmental disorders more broadly.

Traduction Française

La Recherche au cours de la dernière décennie a vu des progrès considérables dans la compréhension de l’architecture génétique des troubles du spectre autistique (TSA), grâce à l’accélération de la caractérisation de la variation génomique le découverte de gène est devenue de plus en plus globale. Dans le même temps, cette recherche a mis en évidence les défis actuels. Ici, nous abordons l’impact majeur du séquençage à haut débit (HTS) sur les TSA, la  découverte de gènes, la mise en place d’un consensus pour tirer parti de cette technologie, et nous décrivons une grande collaboration multicentrique développée pour atteindre ces objectifs. Des approches similaires pourraient se révéler efficaces pour les troubles du développement neurologique graves de façon plus générale.

Bref, il y a encore attendre avant de voir le séquençage complet d’un ADN porteur d’autisme.

A chacun de savoir lire les données dans ce domaine pour se faire une idée.

II/ Autisme et maladie génétiques rares comme la sclérose tubéreuse de Bourneville

De nombreuses maladies autosomiques sont associées à un TED, comme le syndrome de Prader Willi ou encore la Sclérose Tubéreuse de Bourneville.

L’intérêt que leur porte les chercheurs est de tenter de déterminer un phénotype associé à une mutation dans un même gène afin de contourner le problème de la complexité liée à la cartographie génétique.

Le premier abstract explique en quoi il est important de se focaliser sur l’étude des maladies rares. Il fait état d’une collaboration entre une EPST française (l’institut de la médittérannée à Marseille et un pédopsychiatre sud africain formé à Cambridge). L’article est issu d’un numéro spécial dédié a cette thématique et publié par Behavorial Genetic en mai 2011.

Un deuxième abstract de Patrick Bolton de l’institut de psychiatry au Maudsley Hospital à Londres (King’s college) fait état des dernières recherches sur les mécanismes physiopathologiques qui pourraient soutendre l’association entre le troubles envahissants du développement grâce à l’étude des cas combinant maladie rare et TED. Les hypothèses ouvrent ainsi de nouvelles voies de recherche tout à fait pertinentes.

Behav Genet. 2011 May;41(3):341-8

From molecules to behavior: lessons from the study of rare genetic disorders.

Roubertoux PL, de Vries PJ.

Source

Génétique Médicale, Génomique Fonctionnelle, Aix Marseille Université, Marseille cedex, France.

Abstract

Rare diseases are defined as conditions with a prevalence of less than 1/2,000. To date between 6,000 and 7,000 rare diseases have been identified and many of those have manifestations that include intellectual disability, developmental disorders or other behavioural phenotypes. In this special issue we bring together a range of papers where rare diseases were used as models to delineate specific aspects of learning and memory, or behaviour. In this introductory paper we summarize some of the lessons we can learn from rare diseases. Firstly, we learn that, collectively, rare diseases are not at all rare. As many as 1 in 20 individuals may be affected by a rare disease at some point in their life. Secondly, we learn that rare diseases may share common pathophysiological mechanisms. A discovery in one can therefore have direct relevance to many others. A third lesson is that the study of rare diseases can lead to an understanding of common disorders, as exemplified by the relationship between Trisomy 21 (Down syndrome) and Alzheimer’s disease. A fourth lesson from rare diseases is that the ‘one gene-one functional consequence’ assumption is not correct. Finally, rare diseases have shed new light on the strengths and weaknesses of animal models in the study of behavioural phenotypes

Traduction Française

Les maladies rares ont un taux de prévalence inférieur à 1/2 000. À ce jour entre 6.000 et 7.000 maladies rares ont été identifiées et beaucoup présentent des manifestations qui englobent la déficience intellectuelle, les troubles du développement ou d’autres phénotypes comportementaux. Dans ce numéro spécial, nous réunissons une gamme de publications où les maladies rares ont été utilisées comme modèles pour délimiter les aspects spécifiques de l’apprentissage et de la mémoire ou du comportement. Dans cet article d’introduction, nous résumons quelques-unes des leçons que nous pouvons tirer de maladies rares. Tout d’abord, nous apprenons que, collectivement, les maladies rares ne sont pas du tout rares. 1 personne sur 20 peut être touchée par une maladie rare à un moment donné de sa vie. Deuxièmement, nous apprenons que les maladies rares peuvent partager des mécanismes physiopathologiques communs. Une découverte pour une seule peut donc avoir un intérêt direct pour beaucoup d’autres. La troisième leçon est que l’étude des maladies rares peut conduire à une meilleure compréhension des maladies courantes, comme l’illustre la relation entre la trisomie 21 (syndrome de Down) et la maladie d’Alzheimer. Une quatrième leçon des maladies rares est que l’hypothèse «un gène-une conséquence fonctionnelle» n’est pas correct. Enfin, les maladies rares ont jeté un nouvel éclairage sur les points forts et les faiblesses des modèles animaux dans l’étude des phénotypes comportementaux.

BMC Med. 2013 Feb 27;11(1):55. [Epub ahead of print]

Neural connectivity abnormalities in autism: Insights from the tuberous sclerosis model.

Tye C, Bolton P.

Abstract

Autism Spectrum Disorder (ASD) is a behavioral syndrome caused by complex genetic and non-genetic risk factors. It has been proposed that these risk factors lead to alterations in the development and ‘wiring’ of brain circuits and hence, the emergence of ASD. Although several lines of research lend support to this theory, etiological and clinical heterogeneity, methodological issues and inconsistent findings have led to significant doubts. One of the best established, albeit rare, causes of ASD is the genetic condition Tuberous Sclerosis Complex (TSC), where 40% of individuals develop ASD. A recent study by Peters and Taquet et al. analyzed electroencephalography (EEG) data using graph theory to model neural ‘connectivity’ in individuals with TSC with and without ASD and cases with ‘idiopathic’ ASD. TSC cases exhibited global under-connectivity and abnormal network topology, whereas individuals with TSC + ASD demonstrated similar connectivity patterns to those seen in individuals with idiopathic ASD: decreased long- over short-range connectivity. The similarity in connectivity abnormalities in TSC + ASD and ASD suggest a common final pathway and provide further support for ‘mis-wired’ neural circuitry in ASD. The origins of the connectivity changes, and their role in mediating between the neural and the cognitive / behavioral manifestations, will require further study. Please see related research article here http://www.biomedcentral.com/1741-7015/11/54

Traduction

Le trouble du spectre de l’autisme (TSA) est un syndrome comportemental causé par des facteurs de risque génétiques et non génétiques complexes. Il a été proposé que ces facteurs de risque entraînent des altérations dans le développement et le « câblage » des circuits du cerveau et, par conséquent, l’apparition des TSA. Bien que plusieurs lignes de recherche corroborent cette théorie, l’hétérogénéité étiologique, des questions méthodologiques et des résultats contradictoires ont conduit à de sérieux doutes. L’association entre TSA et la  sclérose tubéreuse complexe (TSC) est une des pistes les mieux documentée. 40% des individus vont développer des TSA. Une récente étude de Peters et Taquet et al. a analysé les données de l’électroencéphalographie (EEG) en utilisant la théorie des graphes pour modéliser la «connectivité» neurale chez les personnes atteintes  de TSC avec et sans TSA et les cas de TSA « idiopathique ». Les cas  de TSC présentent globalement une  sous-connectivité et une topologie anormale du réseau, alors que les individus avec TSC + TSA ont un profil de connectivité semblable à ceux observés chez les personnes atteintes de TSA idiopathique: diminution long sur la connectivité de courte portée. La similitude des anomalies de connectivité dans TSC + TSA et TSA seul suggère une voie finale commune et soutien l’hypothèse de l’existence de circuits neuronaux «mal câblé» dans les TSA. Les origines des changements de connectivité, et de leur rôle dans la médiation entre les neurones et les manifestations cognitives / comportementales, nécessiteront une étude plus approfondie.

Vous pouvez trouver l’article en ligne à l’adresse suivante http://www.biomedcentral.com/1741-7015/11/54

III/ Autisme et causes environnementales

Ceci fait aussi l’objet d’un important chapitre; je cite ici un article récent souligné par notre ami David Cohen et dont il faut tenir compte d’ores et déjà dans notre pratique quotidienne, nos prescriptions et notre enseignement. Il s’agit d’une vaste étude de cohorte de naissance réalisée au Danemark chez les femmes enceinte traitées par valproate dans le cadre de leur épilepsies.

Il semble qu’il y a ait une très forte association entre la prescription de valproate chez la femme enceinte et le risque d’autisme.
JAMA. 2013 Apr 24;309(16):1696-703. doi: 10.1001/jama.2013.2270.

Prenatal valproate exposure and risk of autism spectrum disorders and childhood autism.

Christensen J, Grønborg TK, Sørensen MJ, Schendel D, Parner ET, Pedersen LH, Vestergaard M.

Source

Department of Neurology, Aarhus University Hospital, Norrebrogade 44, DK-8000 Aarhus C, Denmark. jakob@farm.au.dk

Abstract

IMPORTANCE:

Valproate is used for the treatment of epilepsy and other neuropsychological disorders and may be the only treatment option for women of childbearing potential. However, prenatal exposure to valproate may increase the risk of autism.

OBJECTIVE:

To determine whether prenatal exposure to valproate is associated with an increased risk of autism in offspring.

DESIGN, SETTING, AND PARTICIPANTS:

Population-based study of all children born alive in Denmark from 1996 to 2006. National registers were used to identify children exposed to valproate during pregnancy and diagnosed with autism spectrum disorders (childhood autism [autistic disorder], Asperger syndrome, atypical autism, and other or unspecified pervasive developmental disorders). We analyzed the risks associated with all autism spectrum disorders as well as childhood autism. Data were analyzed by Cox regression adjusting for potential confounders (maternal age at conception, paternal age at conception, parental psychiatric history, gestational age, birth weight, sex, congenital malformations, and parity). Children were followed up from birth until the day of autism spectrum disorder diagnosis, death, emigration, or December 31, 2010, whichever came first. MAIN OUTCOMES AND MEASURES: Absolute risk (cumulative incidence) and the hazard ratio (HR) of autism spectrum disorder and childhood autism in children after exposure to valproate in pregnancy.

RESULTS:

Of 655,615 children born from 1996 through 2006, 5437 were identified with autism spectrum disorder, including 2067 with childhood autism. The mean age of the children at end of follow-up was 8.84 years (range, 4-14; median, 8.85). The estimated absolute risk after 14 years of follow-up was 1.53% (95% CI, 1.47%-1.58%) for autism spectrum disorder and 0.48% (95% CI, 0.46%-0.51%) for childhood autism. Overall, the 508 children exposed to valproate had an absolute risk of 4.42% (95% CI, 2.59%-7.46%) for autism spectrum disorder (adjusted HR, 2.9 [95% CI, 1.7-4.9]) and an absolute risk of 2.50% (95% CI, 1.30%-4.81%) for childhood autism (adjusted HR, 5.2 [95% CI, 2.7-10.0]). When restricting the cohort to the 6584 children born to women with epilepsy, the absolute risk of autism spectrum disorder among 432 children exposed to valproate was 4.15% (95% CI, 2.20%-7.81%) (adjusted HR, 1.7 [95% CI, 0.9-3.2]), and the absolute risk of childhood autism was 2.95% (95% CI, 1.42%-6.11%) (adjusted HR, 2.9 [95% CI, 1.4-6.0]) vs 2.44% (95% CI, 1.88%-3.16%) for autism spectrum disorder and 1.02% (95% CI, 0.70%-1.49%) for childhood autism among 6152 children not exposed to valproate.

CONCLUSIONS AND RELEVANCE:

Maternal use of valproate during pregnancy was associated with a significantly increased risk of autism spectrum disorder and childhood autism in the offspring, even after adjusting for maternal epilepsy. For women of childbearing potential who use antiepileptic medications, these findings must be balanced against the treatment benefits for women who require valproate for epilepsy control

Traduction française

Intérêt : Le valproate est utilisé pour le traitement de l’épilepsie et d’autres troubles neuropsychologiques et peut être la seule option de traitement pour les femmes en âge de procréer. Toutefois, l’exposition prénatale au valproate peut augmenter le risque d’autisme.

OBJECTIF: Déterminer si l’exposition prénatale au valproate est associée à un risque accru d’autisme chez les enfants.

Méthodologie : Étude basée sur la population de tous les enfants nés vivants au Danemark de 1996 à 2006. Le registres nationaux ont été utilisés pour identifier les enfants exposés au valproate durant la grossesse et un diagnostic de troubles du spectre autistique (autisme infantile [trouble autistique], le syndrome d’Asperger, l’autisme atypique, et d’autres troubles envahissants du développement). Nous avons analysé les risques associés aux troubles du spectre autistique ainsi que l’autisme infantile. Les données ont été analysées par la méthode de régression de Cox pour les facteurs confondants potentiels (âge de la mère lors de la conception, l’âge du père à la conception, les antécédents psychiatriques des parents, l’âge gestationnel, le poids de naissance, le sexe, les malformations congénitales et la parité).

Principaux résultats: risque absolu (incidence cumulée) de trouble du spectre d’autisme infantile chez les enfants après l’exposition au valproate durant la grossesse.

RÉSULTATS:

De 655 615 enfants nés de 1996 à 2006, 5437 ont été identifiés avec un trouble du spectre autistique, et notamment 2067 avec l’autisme infantile. L’âge moyen des enfants à la fin du suivi était de 8,84 années (gamme, 4-14; médiane, 8,85). Le risque absolu estimé après 14 ans de suivi était de 1,53% (IC 95%, 1.47% -1.58%) pour les troubles du spectre autistique et 0,48% (IC 95%, 0.46% -0.51%) pour l’autisme infantile. Dans l’ensemble, les 508 enfants exposés au valproate avaient un risque absolu de 4,42% (IC 95%, 2.59% -7.46%) pour un trouble du spectre autistique (RR ajusté: 2,9 [IC 95% 1.7 à 4.9]) et un risque absolu de 2,50% (IC 95%, 1.30% -4.81%) pour l’autisme infantile (RR ajusté: 5,2 [IC 95% 2,7 à 10,0]). La cohorte des 6584 enfants nés de femmes atteintes d’épilepsie, le risque absolu de trouble du spectre de l’autisme chez les 432 enfants exposés au valproate était de 4,15% (IC 95%, 2.20% -7.81%) (RR ajusté: 1,7 [IC à 95% , de 0,9 à 3,2]), et le risque absolu de l’autisme infantile était de 2,95% (IC 95%, 1.42% -6.11%) (RR ajusté: 2,9 [IC 95%, 1,4 à 6,0]) vs 2,44% (IC à 95% , 1.88% -3.16%) pour les troubles du spectre autistique et de 1,02% (IC 95%, 0.70% -1.49%) pour l’autisme infantile entre 6152 enfants non exposés au valproate.

CONCLUSIONS ET PERTINENCE:

L’utilisation maternelle du valproate durant la grossesse a été associée à une augmentation significative du risque de trouble du spectre de l’autisme et à l’autisme infantile chez les enfants, même après ajustement pour l’épilepsie maternelle. Il faut donc intégrer ces résultats dans la balance bénéfice –risque pour les femmes en age de procréer.

 IV/ Etudes cliniques françaises

J’ai sélectionné deux articles récents qui font état de l’évolution des pratiques cliniques dans nos institutions. Ils soulignent la richesse clinique de nos institutions et nos capacités d’innovation.

Le vécu des soins précoces par les familles d’enfants autistes

Neuropsychiatrie de l’Enfance et de l’Adolescence, In Press, Corrected Proof, Available online 4 June 2013

A. Gaillard, R. Charles, Y.-C. Blanchon, V. Rousselon

Le « projet médical » du jardin d’enfants thérapeutique (JET) du CHU de Saint-Étienne propose des soins précoces aux enfants de trois à six ans souffrant de troubles envahissants du développement, jusqu’à ce qu’ils atteignent l’âge d’une orientation spécialisée (IME, CLIS…) associée à des structures de soins sectorielles. Cette prise en charge institutionnelle et pluridisciplinaire s’intègre dans une offre de soins variée et parfois conflictuelle, laissant les professionnels dans l’expectative. Une étude qualitative a été réalisée de juin 2011 à avril 2012 sur un échantillon raisonné de 15 familles d’enfants présentant un trouble envahissant du développement parmi les 91 ayant fréquenté le JET entre 1994 et 2010. L’objectif de ce travail consistait à évaluer le vécu parental des soins précoces et l’itinéraire thérapeutique des familles. L’entrée au JET a été décrite par les parents comme inquiétante face à ce lieu inconnu, accueillant des enfants à la symptomatologie hétérogène, et dans une période marquée par la confirmation récente du diagnostic, l’isolement familial et social au moment de l’admission. La confiance dans le JET s’est installée souvent rapidement, grâce à un espace unanimement qualifié par les parents de « sécuritaire et protecteur ». D’autres recours ont été décrits dans les différents secteurs du soin (biomédical, populaire ou traditionnel) plus ou moins initiés et contrôlés par l’institution ou au contraire absolument parallèles ou occultes. L’ensemble permettant aux familles de construire un savoir hybride de « parents-experts ». Un sentiment d’abandon a souvent été observé lors de la sortie du JET car les relais sont difficiles à mettre en œuvre du fait d’une pénurie des services médico-sociaux et de la faible mobilisation de professionnels-ressources dans le secteur libéral. Une organisation en réseau ville-hôpital pourrait permettre d’homogénéiser les recours et de prolonger l’accompagnement.

Évaluation prospective d’enfants atteints d’un trouble envahissant du développement après deux ans de prise en charge en hôpital de jour Original Research Article

Archives de Pédiatrie, Volume 20, Issue 1, January 2013, Pages 17-25

F. Poinso, B. Dubois, C. Chatel, M. Viellard, D. Bastard-Rosset, A.-M. Girardot, P. Grandgeorge, S. De Martino, M. Sokolowsky, X. Salle-Collemiche, D. Da Fonseca

L’efficacité des prises en charge en hôpital de jour (HJ) d’enfants atteints de troubles envahissants du développement (TED) en France est encore peu étudiée. Nous présentons une étude prospective de l’évolution de 11 enfants atteints d’un TED et pris en charge en HJ au centre hospitalier universitaire (CHU) de Marseille, durant 2 ans. Cette prise en charge reposait sur l’évaluation initiale du centre de ressources autisme Provence-Alpes-Côte d’Azur (CRA PACA) puis sur l’observation continue de chaque enfant, de ses capacités et de ses besoins. Elle utilisait des approches diverses, durant 10 h hebdomadaires, et s’associait à une guidance parentale et à une intégration scolaire. Cette prise en charge appartenait donc aux catégories des prises en charge éclectiques et non intensives, associant des rééducations et des psychothérapies à des méthodes issues du TEACCH (Treatment and Education of Autistic and related Communication handicapped Children) et du Floor Time Play. Les études internationales concernant les méthodes comportementales intensives suggèrent une meilleure efficacité de ces dernières par rapport à des prises en charge non comportementales ou non intensives. Elles concluent que cette efficacité est due à la conjonction de 2 facteurs : le type de prise en charge (comportementale) et son intensité (supérieure à 25 h par semaine). Dans notre étude, le diagnostic initial avait été confirmé au CRA (ADI : Autism Diagnostic Interview, ADOS : Autism Diagnostic Observation Schedule). Les 11 enfants, âgés en moyenne à l’admission de 3 ans 5 mois, ont été évalués par l’échelle de Vineland et la Childhood Autism Rating Scale (CARS) à 2 reprises : à leur entrée à l’HJ et après 2 ans de prise en charge. Les résultats attestent d’une progression développementale avec un gain moyen de 13,5 mois à l’échelle de Vineland, et une diminution de la sévérité du syndrome autistique à la CARS. La prise en charge proposée a montré son efficacité en comparaison à des études similaires de la littérature : elle obtient de meilleurs résultats à l’échelle de Vineland que les prises en charge éclectiques intensives ou non intensives décrites dans ces études.

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