Newsletter du 31 décembre 2016 de la SFPEADA
Posted on décembre 31st, 2016
Sois sage ô notre douleur
Arrivés au terme de cette année 2016, nous restons marqués par deux événements majeurs qui nous auront profondément affectés :
– le décès de Colette Chiland, une des figures de la pédopsychiatrie nationale et internationale, figure éminente de l’université française et membre essentiel de notre Société.
– la série d’attaques terroristes perpétrées depuis le début de l’année, saisissant et blessant la France toute entière, et qui, avec l’attentat de Nice, interpelle la pédopsychiatrie, de la manière la plus vive, au titre des soins qu’elle peut et doit apporter aux enfants, aux adolescents et aux familles à côté et en même temps que ceux apportés aux adultes dans les situations de traumatismes collectifs.
La douleur d’avoir perdu Colette Chiland s’accompagne du sentiment heureux de l’avoir connue, de l’avoir eue à nos côtés, d’avoir eue la chance de pouvoir cultiver tant de proximité avec une grande dame, philosophe de formation, se situant à l’articulation des différents métiers de la pédopsychiatrie de par ses fonctions de pédopsychiatre, de psychanalyste et de professeur en psychologie clinique à l’université Paris V-Descartes. Nous nous souviendrons du fort soutien qu’elle a apporté aux psychologues – qu’elle formait – lors de la montée vers et pour la reconnaissance du titre de psychologue en 1985.
Nous nous souviendrons aussi de Colette Chiland présidente du Conseil Scientifique de notre Société de 1992 à 1997.
Les membres de l’IACAPAP sont eux aussi, bouleversés d’avoir perdu leur Présidente Honoraire. Après deux mandats de vice-présidente, Colette Chiland a été élue présidente de l’IACAPAP en 1982. Elle a présidé le comité d’organisation du congrès de l’IACAPAP qui s’est tenu à Paris, avec tant de succès, en 2012. Son ouvrage L’enfant de six ans et son avenir a été le coup de diapason d’une œuvre foisonnante dont la dernière manifestation aura été son article donné à la Revue de Neuropsychiatrie de l’Enfance et de l’Adolescence intitulé « Qu’est ce que le genre ? ».
Elle savait dicter à la fois l’enthousiasme et la rigueur. Et dans ses relations d’amitié, son invitation au tutoiement pouvait constituer un passage quelque peu rude et délicat du fait du respect admiratif que nous lui portions.
Nous nous souvenons des nombreuses standing ovations qu’elle a reçues au terme de ses conférences : nous reviennent celles des Journées Nationales de Limoges, celle de l’ouverture de l’IACAPAP à Paris, en 2012, ou encore celle d’un récent congrès de l’Encéphale, toujours à Paris. Elle nous aura fait et elle nous fait tenir debout, nous avec la pédopsychiatrie toute entière.
Le lecteur trouvera sur notre site les hommages qui lui ont été rendus au travers des paroles prononcées lors de ses funérailles au Père Lachaise, le 27 septembre, et celles écrites, parues dans le Bulletin de l’IACAPAP. Une journée d’hommage, en voie d’organisation, sera dédiée à Colette Chiland, : elle se déroulera le 22 septembre 2017, à Paris.
Autre forme de douleur éprouvée lors de cette année écoulée : celle de l’atteinte portée, par une série d’attentats terroristes, aux vies humaines et aux liens entre les personnes tuées ou blessées avec leurs proches. Cette douleur nous convoque quant à elle, à une nouvelle forme de mobilisation devenue nécessaire.
Restera particulièrement présent dans nos mémoires le Conseil d’Administration du 2 septembre durant lequel Florence Askenazy a témoigné des évènements de Nice et de l’impact de l’attentat perpétré le jour de la fête nationale sur la promenade des Anglais, touchant tant de familles meurtries et rencontrées par l’équipe de pédopsychiatrie de la Fondation Lenval. Rarement un CA a connu un si poignant moment. Daniel Marcelli, parti soutenir les équipes soignantes niçoises, proposant une approche groupale, nous a également fait part de son expérience des conséquences de ces évènements dramatiques.
Notre CA a aussitôt décidé d’impulser une réflexion sur l’organisation des soins que la pédopsychiatrie peut et doit apporter aux enfants, aux adolescents et aux familles, à côté et en même temps que ceux déjà efficacement apportés aux adultes dans les situations de traumatismes collectifs. L’attentat de Nice, par sa dimension d’atteinte directe des familles, a renforcé la nécessité de notre mobilisation sur cette préoccupation.
La SFPEADA a donc pris l’initiative, sous l’égide de la Fédération Française de Psychiatrie, d’organiser une journée nationale, d’accès gratuit sur inscription, consacrée à cette question. Elle s’intitulera « L’enfance attaquée. La pédopsychiatrie face aux traumatismes collectifs ». Elle se tiendra le 6 mars à l’Université Paris 7-Juissieu. Le Secrétariat d’Etat à l’Aide aux Victimes (SEAV), soutient cette journée et la Ministre, Madame Juliette Méadel, participera à cette journée dont le programme détaillé sera très prochainement consultable sur notre site.
Sur ce thème, le Secrétariat d’Etat à l’Aide aux Victimes est en train d’organiser des tables rondes d’experts, au nombre desquels figurent des membres de notre Société, afin que soit investi et développé champ de la formation des professionnels appelés à intervenir en situation de traumatisme collectif.
C’est dans le même mouvement qu’est organisée à l’UNESCO, les 9 et 10 janvier 2017, une Conférence Internationale pour l’Aide aux Victimes (CIVIC), également d’accès gratuit et aussi sur inscription; vous pouvez trouver le programme et la présentation sur notre site.
Enfin, la SFPEADA vient de proposer au prochain congrès de l’ESCAP, qui se tiendra à Genève en juillet 2017, un symposium qui reprendra ces questions du faire face aux traumatismes collectifs. Aux collègues français – Florence Askenazy parlera de l’attentat de Nice et Jean-Philippe Raynaud, quant à lui, de l’accident industriel d’AZF à Toulouse, en 2001. Viendront se joindre deux de nos collègues, l’un israélien et l’autre norvégien : le premier évoquera l’expérience au long cours du faire face aux attentats, le second du suivi apporté aux familles après le massacre d’Utoya, en 2011.
Finalement, la sagesse que nous demandons à notre douleur, est celle de réussir à nous mobiliser. C’est la leçon que nous aurons reçue de Colette Chiland. C’est ce que nous essayons de faire par ces temps de menace qui sont aussi des temps de solidarité.
Très cordialement à chacun.