Cahier des charges Hôpital de jour accueillant des enfants adolescents Trouble du Spectre de l’Autisme

Posted on octobre 2nd, 2018

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Contexte

Historiquement, la pédopsychiatrie a été précurseur dans la mise en place au cœur de la cité de soins intensifs pour des enfants en grande souffrance psychique, en particulier au niveau de l’organisation sectorielle mais aussi dans le cadre associatif. Parmi ces outils de soins, il s’est développé une forme de prise en charge intensive nommé Hôpital de jour. Ces hôpitaux de jour ont des organisations diverses et accueillent des publics très différents. Or, les hôpitaux de jour de pédopsychiatrie sont régulièrement sollicités avec insistance par des structures du sanitaire, du médico-social et des familles pour accueillir des enfants et adolescents présentant un Trouble du Spectre de l’Autisme tel qu’il est défini dans le DSM 5. Nous avons choisi d’utiliser ce diagnostic plus conforme à l’approche neurodévelopementale actuelle alors même que le codage officiel qui utilise la CIM 10 nomme ces troubles trouble envahissant du développement.

Au regard de l’expérience acquise dans la prise en charge de ces enfants ainsi que la prise en compte de nouvelles connaissances, l’ensemble des professionnels de la pédopsychiatrie au sein du collège de pédopsychiatrie de la FFP qui regroupe l’API, La FDCMPP, la SFPEADA, la SIP ont travaillé à un cahier des charges spécifique concernant la prise en charge des enfants et adolescents présentant un TSA en hôpital de jour

Définition

Les hôpitaux de jour de pédopsychiatrie sont des structures qui permettent la réalisation d’évaluations approfondies, de soins soutenus et la construction de projets personnalisés.

Pour ce faire, ils réunissent une équipe pluri-professionnelle spécialisée sous la responsabilité d’un pédopsychiatre. Ils développent une collaboration avec les partenaires du sanitaire public ou libéral, les CAMPS, les CMPP et tous les établissements Médico-sociaux, les professionnels de l’éducation nationale et l’ensemble des professionnels du champ de l’enfance et de l’adolescence. Ceci permet une gradation des interventions intra et extra- institutionnelles s’inscrivant dans le parcours de soins global et le parcours de vie de l’enfant et l’adolescent.

Les caractéristiques des hôpitaux de jour se situent dans une compétence d’évaluation, d’analyse diagnostique multidimensionnelle soutenue par les compétences croisées de ses professionnels. La construction du projet personnalisé de l’enfant et de l’adolescent associe la famille et les professionnels qui ont participé à l’évaluation diagnostique, qui sont souvent les mêmes que ceux qui réalisent les interventions à l’hôpital de jour, ce qui garantit la fluidité et l’adéquation entre l’évaluation diagnostique et les interventions qui en découlent.

Dès l’admission de l’enfant, de l’adolescent, une attention particulière est portée sur la prise en compte des souhaits des familles et les perspectives et les possibilités de socialisation et d’inclusion par le travail de coordination et d’articulation avec les différents acteurs du territoire.

Indications :

Jeunes enfants à risque de développer des troubles autistiques, justifiant une prise en charge intensive précoce.

Tableaux cliniques à « phénotype autistique »

Troubles de la communication, retard ou anomalie dans le développement, troubles du neurodéveloppement dans un contexte de carences affectives et éducatives, de négligences, troubles de l’attachement, déficience mentale…

TSA complexes :

  • Soit sur le plan clinique (troubles du comportement (automutilations, tantrisme, etc.), comportement défi, comorbidités psychiatriques et/ou somatiques, etc.)

  • Soit sur le plan environnemental (situations de souffrance familiale majeure, maladies psychiatriques parentales, problématiques interculturelles, etc.)

  • Soit à des périodes charnières du développement

Ces hôpitaux de jour proposent des groupes spécifiques en fonction de l’âge de l’enfant, par exemple 18 mois-3 ans, 2-6 ans ; 6-12 ans ; 12-15, 16-18 ans

Les durées d’hospitalisation sont modulables. Une durée moyenne de 2 ou 3 années consécutives peut raisonnablement être envisagée hormis en phase d’évaluation, nécessairement de durée très limitée.

Objectifs

– Affiner l’évaluation de façon condensée et globale sur un temps court :

– Initialement pour aboutir à un diagnostic multidimensionnel et complet. Il peut être réalisé sans impliquer obligatoirement un suivi dans la structure. Il participe à l’explicitation des troubles de l’enfant et l’adolescent ainsi qu’à l’annonce diagnostique. Il permet d’évaluer l’efficacité des traitements mis en place, l’adéquation de l’accompagnement individuel et familial et surtout de préparer le projet individualisé dans une concertation avec les parents et les structures susceptibles d’accueillir l’enfant/ adolescent avec TSA à ce moment précis de son développement.

Ultérieurement lorsque surviennent des changements, ou de comportements nouveaux ou des difficultés critiques en particulier dans les structures qui l’accueillent (structures médico-sociales, structures éducatives, structures scolaires, …) rendant problématique le maintien de sa prise en charge. L’accueil et l’observation dans un contexte adapté, sur un temps suffisamment long (2 à 3 mois rarement plus) peut être nécessaire. Cette fonction relais est indispensable pour épauler les familles et de nombreuses institutions médico-sociales ou autres lors de ces phases de décompensation plus ou moins aigues.

  • Permettre un accompagnement de l’enfant/adolescent et de sa famille dans l’annonce diagnostique et les évolutions cliniques

– Permettre un traitement intensif en articulant différentes approches thérapeutiques dans une unité de lieu, support d’un cadre sécurisant pour l’enfant et sa famille, ce qui n’est pas possible lors d’interventions dispersées sur plusieurs lieux ou structures.

– Prendre en charge les comorbidités médicales et psychiatriques : pathologies physiques sources de trouble du comportement, angoisses, dépression, conduites auto-agressives, troubles du sommeil, troubles alimentaires les troubles neuro-développementaux associés (TDAH, troubles spécifiques des apprentissages, etc.)

– Coordonner le parcours de soins somatiques, organisation des évaluations neuro-pédiatriques, d’imagerie médicale, de bilan génétique avec une préparation attentive et un accompagnement du patient et de sa famille.

– Prendre en charge le traitement pharmacologique, lorsqu’il est indiqué, évaluation de ses effets et en assurer les réajustements réguliers

Mise en œuvre :

Le projet de soins individualisé et coordonné de l’enfant en hôpital de jour est établi selon les recommandations de l’HAS, et associe les approches et actions synergiques thérapeutiques, éducatives, pédagogiques et somatiques.

Ce projet de soins individualisé prend en compte les particularités de l’enfant : compétences propres, émergences, … et propose des interventions à la fois dans le domaine sensori-moteur, communication, émotions, socialisation, autonomie, le développement affectif.

Ce projet est construit à partir d’une réflexion partagée qui rassemble les observations de la famille, de l’ensemble des soignants et les diverses manifestations de l’enfant dans les lieux qu’il fréquente : famille, école et autres lieux de socialisation. Cette fonction de synthèse et d’échanges est un des éléments essentiels de la dimension thérapeutique de l’hôpital de jour. Elle est garantie par des temps de Réunions de Concertation Pluridisciplinaire hebdomadaires.

Moyens, formation :

Un cadre architectural adapté au public accueilli (sonorité, dimension des espaces…)

Un cadre organisationnel stable comprenant :

– un personnel médical et soignant formé à la clinique pédopsychiatrique, à sa dimension développementale et aux procédures recommandées d’évaluation et de soin.

– Un pédopsychiatre responsable de la cohérence du travail pluridisciplinaire intensif

  • Dispositif de soins somatiques

  • Diverses conventions partenariales

– Un dispositif d’analyse des pratiques

Outils

Utilisation d’outils standardisés et en particulier les échelles d’intensité et d’analyse du fonctionnement : CARS, bilans psychomoteur, orthophonique, psychologique. D’autres outils comme le PEP, l’ADO, l’ADI, la VINELAND peuvent enrichir l’observation. Ces évaluations sont associées à une observation interactionnelle qui est réalisée, répétée à intervalle régulier à partir d’ateliers médiatisés et diversifiés. Une synthèse est réalisée avec la famille et transmise sous forme écrite permettant le suivi de la progression de l’enfant.

Les outils thérapeutiques proposés comprennent un ensemble d’approches adaptées aux objectifs du projet personnalisé de l’enfant, de l’adolescent. Ils prennent en compte les différents domaines que nous avons cités et leurs intrications ainsi que les souhaits des familles. 

Une attention particulière est portée sur

– Approches centrées sur la communication (techniques de communication alternatives, modalités d’expression artistiques, …)

– Approches centrées sur le corps en particulier tout ce qui concerne la dimension sensorielle et sensori-motrice, la régulation émotionnelle, l’organisation posturale, les compétences motrices et habilités manuelles, la structuration spatiale, les représentations temporelles et corporelles toujours intégrées dans une dynamique relationnelle. (Exemple: le modèle Bullinger)

– Approches centrées sur la socialisation (Groupes d’entrainement aux habilités sociales, repas, activités à l’extérieurs de l’hôpital de jour, …)

La SFPEADA attire tout particulièrement l’attention sur l’intérêt qu’il y aurait à intégrer dans l’équipe soignante des auto-représentant rémunérés, personne autiste, pouvant animer certains ateliers en direction des patients autistes

Intensité de la prise en charge 

En fonction des temps d’inclusion scolaire ou dans les dispositifs de socialisation, il est souhaitable que l’enfant ou l’adolescent bénéficie d’un minimum de 3 ou 4 demi-venues par semaine.

Processus d’admission et de sortie

Le processus d’admission dépend des critères d’indication précités et des places disponibles en favorisant une entrée la plus rapide possible.

Le processus de sortie est guidé par le projet de soins individualisé de l’enfant ou l’adolescent, coordonné si besoin avec la MDPH

La famille est associée à l’ensemble des processus d’évaluation et de décision.

Une attention particulière est portée sur l’importance de la continuité de prise en charge en fonction des possibilités d’inclusion et d’accueil dans les différentes structures scolaires, médico-sociales et de socialisation pour la tranche d’âge.

La mise en place d’un relais de prise en charge est vérifiée au cours du processus de sortie (CMP, CMPP, Prise en charge libérale, …)

Place des familles

La famille a une place essentielle dans le dispositif thérapeutique. Elle participe aux observations de l’enfant et à la mise en place d’outils thérapeutiques. Cependant chaque famille est spécifique et présente ses propres besoins qui doivent être prise en compte afin d’assurer la prévention de son épuisement, et offrir à leurs enfants un climat de sécurité. L’hôpital de jour va donc proposer différents outils afin de construire un lien de confiance solide entre les soignants et la famille

Outils proposés aux familles :

Construction du projet individualisé de soins de l’enfant accueilli en tenant compte des choix des familles

Participation et transmission régulière des évaluations à un rythme rapproché (mensuelle par exemple) avec une synthèse formalisée, écrite, au minimum annuel.

Soutien, guidance, accompagnement parental proposés sous diverses formes :

– individuel 

– groupes de parole

– groupes d’entraide

– interventions à domicile

Participation des familles à des actions thérapeutiques au sein d’hôpital de jour

Accompagnement de la famille dans son ensemble en tenant compte de ses spécificités : accueil des fratries, prise en compte des aidants familiaux.

Partenariat :

Dispositifs sanitaires :

Collaboration et conventionnement avec les services de soins somatiques et les équipes de soins psychiatriques (enfants, adultes).

Mise en place de dispositif de transition quand le patient devient adulte.

Dispositifs médico-sociaux :

Collaboration et conventionnement pour permettre des accompagnements partagés d’enfants pour :

  • Evaluer l’enfant dans un contexte sanitaire différent de son quotidien

  • Soutenir le maintien d’enfants et d’adolescents dans les structures médico-sociales dans des moments de crise

  • Accompagner l’intégration dans les structures médico-sociales ou sociales

Dispositifs scolaires :

Etroite collaboration avec l’Education Nationale afin :

  • de faciliter l’inclusion scolaire,

  • réévaluer les bénéfices de celle-ci et les difficultés pour les enfants et les enseignants,

  • évaluation des apprentissages

  • analyser les obstacles et tenter d’y remédier, etc.

Mise en place de convention afin

  • de permettre la présence d’un enseignant détaché à l’intérieur de l’hôpital de jour pour faciliter l’inclusion scolaire

  • de développer les unités d’enseignement à l’intérieur des écoles, avec la possibilité d’intervention au sein de l’Unité d’enseignement du personnel soignants de l’hôpital de jour

  • de développer des formations partagés entre le personnel de l’hôpital de jour et le personnel de l’éducation nationale sous forme de partage d’expériences

Dispositifs municipaux :

Collaboration et conventionnement avec les mairies pour permettre l’accueil d’enfants et adolescents présentant un TSA dans des dispositifs de socialisation correspondant à la tranche d’âge : centres de loisirs, centres sportifs et culturels

Septembre 2018


2 commentaire(s) :

  1. Dr Noël POMMEPUY dit :

    Bonjour,

    Merci pour ce travail clair et exhaustif.
    une petite remarque sur l’orthographe des outils utilisés : PEP-3, ADOS, ADI-R, Vineland II. Je recommanderai aussi l’utilisation de l’échelle ABC (Aberrant Behavior Checklist, Aman 1985) avant et après la mise en place d’un traitement. Par ailleurs divers outils existent pour évaluer la qualité de vie (sommeil, douleur, alimentation…) et leur répercussion sur le développement de l’enfant et la vie de la famille.
    Enfin, je me demandais s’il serait possible de mettre en palce un espace collaboratif où les projets institutionnels de nos HDJ pourraient être postés, ainsi que les outils « maison » afin de les partager et d’échanger sur nos pratiques.
    merci de vos réponses,
    Cordialement,
    Dr Pommepuy, secteur 93I05, Ville-Evrard

    1. daniel marcelli dit :

      merci pour la rapidité de votre commentaire. Comme vous avez pu le constater il s’agit là d’une possibilité nouvelle sur notre site et nous réfléchissons à une « procédure » (encore une!) de réponse avec une veille régulière. Nous tiendrons compte de toutes les remarques et seront attentifs aux diverses propositions. Nous espérons que cette nouvelle rubrique concernant les réflexions et travaux que le CA poursuit rencontrera l’intérêt de nos membres!
      D. Marcelli, président de la SFPEADA

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